PSYCHOTHÉRAPEUTE
AVEC CHRISTINA CABRAL
Novembre 2023 | Musique et montage par Alex Andraos
Christina Cabral est psychothérapeute, travailleuse sociale en oncologie et thérapeute conjugale et familiale. On clarifie ensemble sa réalité professionnelle sous ces trois chapeaux, on discute de la complémentarité de ces rôles et du plus important qu’ils peuvent apporter dans une équipe multidisciplinaire, mais aussi à une population qui recherche de plus en plus de services en santé mentale.
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Psychothérapeute, ts, tcf
AVEC CHRISTINA CABRALAimy :
Bonjour et bienvenue aux portraits professionnels, le balado où on tente de clarifier différentes professions du marché du travail. On discute aujourd’hui avec Christina Cabral. Elle est psychothérapeute, travailleuse sociale en oncologie et thérapeute conjugale et familiale. On clarifie ensemble sa réalité professionnelle sous ces trois chapeaux, on discute de la complémentarité de ces rôles et du plus important qu’ils peuvent apporter dans une équipe multidisciplinaire, mais aussi à une population qui recherche de plus en plus de services en santé mentale.
Aimy :Christina Cabral, bonjour!
Christina :Bonjour!
Aimy :Tu vas bien?
Christina :Ça va bien, toi?
Aimy :Ça va bien, merci! Alors, je suis très contente de te recevoir aujourd’hui. Ça fait longtemps qu’on s’en parle, mais là pour de vrai de vrai de vrai, on se rencontre pour que tu nous parles de ton beau métier. Veux-tu nous dire qu’est ce que tu fais?
Christina :Qu’est-ce que je fais? Je suis travailleuse sociale, psychothérapeute, thérapeute conjugale et familiale, alors ça c’est beaucoup de mots, mais concrètement je travaille dans un hôpital où est-ce que je suis travailleuse sociale en oncologie, donc je travaille avec des patients qui ont le cancer et leurs familles et aussi j’ai une pratique privée où est-ce que je travaille avec des gens aux prises avec des problèmes différents.
Aimy :OK, excellent. Là tu as un long long titre, donc une signature de cinq lignes dans ton courriel.
Christina :C’est ça! Beaucoup de lettres et de points.
Aimy :Beaucoup de lettres et de points (rires), excellent! Donc, psychothérapeute, thérapeute conjugale et familiale et travailleuse sociale en oncologie. Ça fait que quand tu, admettons là tu vas à un 5 à 7 là, tu rencontres quelqu’un que tu ne connaissais pas : « Bonjour Christina, qu’est-ce que tu fais de ta peau? » Tu racontes ça. Qu’est-ce que les gens imaginent que tu fais de tes journées?
Christina :Bien là ça dépend quel titre j’utilise, parce que je n’aime pas dire le trois, parce qu’après ça personne ne va me parler dans le 5 à 7 (rires).
Aimy :(Rires).
Christina :Mais quand je dis travailleuse sociale, c’est sûr qu’ils pensent que je travaille à la DPJ, que je place les enfants, ou bien que j’aide les pauvres. Alors : « Ah, toi tu aides les défavorisés ». Hmmm donc, ça c’est avec le travail social. En thérapie, psychothérapie et thérapie conjugale et familiale, les gens vont plus… ils vont penser que je fais des suivis avec les gens, ce qui est pas mal vrai.
Aimy :Donc une vision un petit peu plus ajustée, quelque chose d’un peu plus connu.
Christina :Ouais c’est ça!
Aimy :OK. Ça fait qu’on a beaucoup de choses à « unpack » parce que tu as plusieurs chapeaux, mais si je te demandais, admettons une journée typique de psychothérapeute pour toi, ça peut avoir l’air de quoi?
Christina :Alors bien c’est voir des clients, donc pendant des sessions de thérapie, puis après ça faire du travail en lien avec ces clients, si je dois trouver une ressource pour eux, les référer quelque part, prendre des notes aussi, mais ça se résume pas mal à ça.
Aimy :OK. Puis les clients qui te consultent ils peuvent venir te voir pour quoi, par exemple?
Christina :Anxiété, dépression, d’autres problèmes de santé mentale, des problèmes de relations avec leurs conjoints, leurs enfants, des parents, la famille ou juste des problèmes d’estime de soi ou juste des difficultés aussi à un certain moment de leur vie : un moment de transition, par exemple.
Aimy :OK, vraiment différentes affaires, différents moments charnières-là qui peuvent faire que quelqu’un viendrait te consulter. OK, maintenant comme travailleuse sociale en oncologie : Qu’est-ce que je pourrais te voir faire si je te voyais au travail?
Christina :(Rires). Ah! Ça c’est plus difficile à décrire, mais donc c’est une journée vraiment variée, donc il y a des rencontres avec les patients, avec leurs familles, il y a aussi beaucoup de rencontres avec l’équipe multidisciplinaire qui entoure le patient. Donc pour arrimer les services, pour être sûr qu’on est sur la même longueur d’ondes pour vraiment aider la personne le mieux qu’on peut, aussi, des contacts avec des partenaires comme le CLSC ou d’autres organismes qui pourraient aider la personne. Donc les référer, s’assurer que le suivi soit fait. Contacts avec des fondations pour les référer par exemple pour avoir accès à de l’aide financière. Donc c’et beaucoup de contacts avec d’autres professionnels, aussi avec des patients. Aussi c’est sûr qu’il y a une partie administrative là, des exigences en fait administratives comme tenir des statistiques. Aussi les notes au dossier, puis les exigences administratives de mon département, par exemple.
Aimy :Hmmm mmm! Puis si on revient un peu au concept de l’équipe multidisciplinaire. Le rôle de la travailleuse sociale autour de la table ça pourrait avoir l’air de quoi?
Christina :Bien la travailleuse sociale c’est celle qui a, celle qui tient toujours en compte le besoin du patient et ou de la famille, qui est leur avocat.
Aimy :Il y a une notion « d’advocacy », là!
Christina :Oui c’est ça! Donc c’est sûr qu’idéalement on aurait à offrir tout ce dont le patient a besoin, mais souvent ce n’est pas le cas, donc il faut, il faut voir qu’elle serait la meilleure solution. Donc c’est aussi un rôle de trouver des solutions aux problèmes plus complexes. Il y a des problématiques sociales. Les gens viennent pour un cancer, mais il y a d’autres problématiques autour là. Les gens, ils ont toutes sortes de vies différentes, ils ont un cancer dans un moment dans leur vie qui est différent l’un de l’autre. Ce n’est pas la même chose d’avoir un cancer à 60 ans qu’à 30 ans. Il y a toujours des problématiques qui entourent les gens, donc on essaie d’aider le mieux possible. Alors c’est vraiment d’être la voix du patient, de la famille. Puis aussi essayer de trouver une solution qui marche aussi dans le système là, étant donné les ressources limitées puis toutes les contraintes qu’on peut imaginer du système.
Aimy :Ben oui, puis sans briser là la confidentialité, est-ce que tu pourrais nous donner comme un exemple typique?
Christina :De…?
Aimy :De admettons, bon : On est autour de la table. Il y a toi, il y a le médecin peut-être, il y a peut-être des infirmières, il y a peut-être un psychiatre. Ça fait qu’il y a différentes personnes dans un dossier, puis là toi tu as à tenir un peu ce morceau, hein? Qui va être de porter la voix du patient. Ça pourrait être quoi les problématiques par rapport auxquelles on a à discuter?
Christina :Par exemple la planification de congés, ça c’est quelque chose. Dans l’hôpital c’est un des rôles majeurs des travailleurs sociaux. C’est sûr que moi je travaille dans une clinique externe donc les gens ne sont pas hospitalisés quand je les rencontre. Ils viennent à l’hôpital pour leurs traitements, puis ils retournent chez eux, mais la majeure partie des travailleurs sociaux travaillent dans des unités, des étages dans les hôpitaux, puis ils sont en charge souvent dans la planification de congés. Donc où est-ce qu’une personne va aller après son… après qu’elle n’ait plus besoin d’être hospitalisée. Puis ça ça peut être une source de beaucoup de tensions entre le patient, sa famille et l’équipe médicale et dans l’équipe, donc il peut y avoir différentes personnes qui pensent que la personne est prête à avoir son congé et d’autres qui pensent qu’elle n’est pas prête. Finalement la décision revient au médecin, parce que c’est le médecin qui admet des gens à l’hôpital puis qui leur donnent leur congé, mais il ne travaille pas en silo là! Il travaille avec toute l’équipe donc on peut être dans une situation où est-ce que la famille du patient… par exemple le patient veut quitter l’hôpital. La famille qui prend soin du patient n’est pas prête à l’accueillir, pense qu’il a besoin d’être hospitalisé, n’a pas les ressources nécessaires. Le physiothérapeute et l’ergothérapeute pensent que le patient pourrait retourner à domicile. Le médecin veut qu’il retourne parce qu’il a besoin du lit puis ce n’est pas méchamment que je dis ça, mais c’est vraiment la réalité là! C’est que les lits sont… on le lit partout dans les nouvelles là, on a besoin de lits donc il faut qu’il y ait un roulement. Donc il y a toute cette pression-là et la travailleuse sociale bien c’est celle qui va essayer… qui est au milieu de tout ça, qui doit prendre en compte les besoins du patient et aussi de la famille parce que c’est, dans certaines situations, il y a des patients en situation très vulnérable donc on va dépendre de la famille pour de l’aide et aussi prendre en compte les réalités du système, comme : quel genre d’aide ils peuvent avoir du CLSC. Est-ce qu’ils vont avoir le nécessaire et tout ça? Donc il peut y avoir, c’est ce genre de situations très complexes là, qui se complexifient par exemple si quelqu’un est atteint de démence ou qu’il n’est pas compétent ou qu’il est entre les deux, qu’il a des journées plus lucides que d’autres. Alors, c’est là que ça se complique!
Aimy :C’est comme des situations de vie, on parlait de moments charnières hein, il y a ça aussi là! « J’ai été hospitalisé, il s’est passé tout ça, là je quitte, je ne quitte pas. ». Il y a plein d’enjeux qui viennent autour de ça.
Christina :Hmmm mmm!
Aimy :Excellent. Si on recule dans le passé un peu. Si je t’avais rencontrée ; c’est drôle parce qu’on se connait là il faut dire la vérité ; mais si quelqu’un d’autre t’avait rencontrée au secondaire, qu’est-ce qu’il aurait vu comme genre d’élève?
Christina :Au secondaire, comme académique? Du point de vue euh…
Aimy :Comme personne!
Christina :Ouais, bien je n’étais pas tellement préoccupée par l’école. Mes parents ils m’ont rapporté que j’aurais dit ; je ne me rappelle pas de ça, mais ça marche là, je comprends, ça marche avec qui je suis ; que je veux… c’est correct pour moi d’avoir les notes dans la moyenne parce que je veux avoir un équilibre dans ma vie. Je veux voir mes amis, je veux faire mes parascolaires, donc je ne veux pas comme passer tout mon temps à étudier. Alors…
Aimy :Déjà cette lucidité à ce jeune âge, incroyable, incroyable!
Christina :(Rires).
Aimy :OK, donc pas trop préoccupée, mais ça se passe correct. Comment est-ce que tu en viens à faire les choix qui te mènent à où tu es aujourd’hui?
Christina :Bien j’ai vraiment essayé de ne pas être travailleuse sociale, j’ai essayé du plus fort que je pouvais. J’ai échoué.
Aimy :Pourquoi donc?
Christina :Parce que ma maman est travailleuse sociale et alors comme toute bonne jeune adulte et adolescente, je ne voulais pas faire ce que ma mère faisait. Apparemment tout le monde savait que j’allais devenir travailleuse sociale sauf moi tellement j’ai évité la chose là. Maintenant je sais que ça s’appelle de l’évitement et du déni, mais c’est vrai que c’est une trajectoire normale pour un jeune adulte. Alors, bien je voulais être dans une profession où je pourrais aider des gens, mais je disais que je ne voulais pas aider euh… je ne voulais pas faire de la thérapie. Je voulais faire, effectuer des changements globaux. Je voulais comme sauver la planète, alors je me suis en allée… j’ai étudié en développement international, donc j’avais ce désir d’aider, mais je pensais que je voulais travailler aux Nations Unies par exemple. Et là je me suis rendue compte, en développement international j’ai fait quelques stages, puis je me suis rendue compte que finalement après le BACC, je n’avais pas vraiment des compétences pour dire « je suis X », comme j’ai remarqué par exemple qu’on pouvait aller creuser un puits quelque part, bien on pourrait être ingénieur pour donner ça, ou médecin, mais moi je n’avais pas comme une profession, une identité ou un bagage, des compétences. Alors là je me suis mise à chercher, puis à travers le stage que j’ai fait aussi bien j’ai réalisé comme : toutes les flèches pointaient vers le travail social. Alors malgré moi j’ai fait une maîtrise en travail social.
Aimy :OK excellent. Hmmm les autres titres que tu es allée chercher. Ah oui, on n’est pas rentré dans la thérapie familiale et conjugale. Je suis très curieuse. Je « backtrack », je recule, je recule je recule, personne n’a rien entendu. C’est quoi ça de la thérapie familiale et conjugale?
Christina :Littéralement la définition ou…?
Aimy :Bien, comment toi tu te l’expliques?
Christina :Bien c’est comme du travail social, mais ton client c’est la famille ou le couple. Donc il n’y a pas… en fait c’est la principale, le principal facteur qui différencie ça de la thérapie individuelle. C’est que le client c’est le système, de couple ou de famille. Donc j’ai fait un stage à l’hôpital où je travaille maintenant, puis c’est comme ça que je suis restée au même hôpital. J’ai fait un stage pendant ma maîtrise en pédopsychiatrie, puis là je ne savais pas vraiment dans quoi je m’embarquais, mais je voulais travailler avec les enfants, mais le stage finalement c’était de la thérapie familiale. C’était ça ma principale tâche, donc j’ai vraiment aimé, j’ai vraiment aimé ça. Je suis comme tombée en amour avec ça. J’ai eu une bonne superviseure qui m’a vraiment donné le goût de faire ça. Et là après mon stage j’ai eu une opportunité à l’hôpital, donc j’ai été engagée comme travailleuse sociale, puis là encore une fois on dirait que toutes les routes menaient là, parce qu’il y avait un programme de formation pour la thérapie conjugale et familiale à l’hôpital même, donc je pouvais faire cette formation en étant… en travaillant. Je travaillais puis je suivais cette formation en même temps, donc ça allait vraiment bien ensemble. C’est vraiment à partir du stage que j’ai vraiment aimé cette dynamique, cette façon de travailler. Il y a quelque chose qui est différent quand on travaille avec une famille, surtout quand il y a des enfants en bas âge. C’est une autre façon de travailler.
Aimy :Une approche complètement différente!
Christina :Ouais!
Aimy :Là on explique la thérapie familiale et conjugale un peu comme étant une façon différente de faire du travail social, ça fait que si je recule encore plus puis que je te demande un peu : Comment est-ce que tu expliques, admettons à quelqu’un qui ne connait pas ça du tout, c’est quoi le travail social?
Christina :C’est une grosse question ça! C’est tellement dur à expliquer. Il y aurait une définition je suis sûre sur le site de l’ordre là.
Aimy :On pourra mettre des liens vers tout ça, mais…
Christina :C’est ça!
Aimy :Mais dans des mots à toi admettons?
Christina :Ouais! Ça dépend d’où est-ce qu’on travaille, donc c’est vraiment à la base : Aider les gens avec la problématique qui se présente. Ce qui est spécial avec le travail social c’est qu’on tient en compte plusieurs facteurs, pas juste admettons la biologie ou la personnalité de la personne, ou son être psychologique, mais aussi son entourage, son emploi, sa famille ou ses études, le système dans lequel la personne est! On tient en compte tout ça dans l’évaluation puis on travaille avec la personne pour améliorer qu’est-ce qu’ils veulent améliorer.
Aimy :Quand on parle de cette approche systémique, puis là j’entends, puis tu me corriges si je l’entends mal là, mais ce que j’entends c’est que l’intervention ne serait pas nécessairement juste sur la personne puis son petit nombril, mais bien sûr son système en entier. Je pourrais aller tirer des cordes un peu sur tout ça.
Christina :C’est ça. C’est global, puis c’est pour ça que la thérapie, pour moi, la thérapie familiale et le travail social vont tellement bien ensemble! C’est comme un « fit » naturel. Puis par exemple à l’Université McGill où est-ce qu’il y a un programme de formation pour thérapie conjugale et familiale, bien c’est dans l’école de travail social. C’est ensemble.
Aimy :Il y a une cohérence là.
Christina :Oui parce qu’on tient en compte le système puis c’est vraiment la perspective systémique aussi.
Aimy :Puis une famille c’est exactement ça, un système!
Christina :C’est ça. Puis c’est ça qui donne pour moi de l’espoir aussi. Les gens vont souvent me dire là : « Ah travailleuse sociale, ça ne doit pas être facile ». Puis c’est sûr qu’il n’y a aucun domaine en travail social qui est facile, mais des fois quand on effectue un petit changement sur un des systèmes, donc en travail social admettons on change une partie de quelque chose pour quelqu’un, ou dans une famille il y a une personne qui change quelque chose, bien ça a un effet sur tout le monde. Donc ça peut avoir des effets bénéfiques qu’on ne peut même pas s’imaginer. Alors c’est ça pour moi qui est tellement beau à voir, puis ça donne de l’espoir.
Aimy :De travailler sur la cascade là, de ce que ça peut engendrer.
Christina :Ouais! Puis même la personne peut penser que c’est quelque chose d’inatteignable ce qu’elle veut, mais quand elle voit un petit changement dans la bonne direction, bien ça lui donne aussi beaucoup d’espoir puis de courage pour les prochains changements.
Aimy :Hmmm mmm! Qu’est-ce que tu dirais que quelqu’un doit avoir comme qualité ou comme compétences pour être bon dans les différents domaines que tu occupes?
Christina :Bien je pense qu’il faut avoir d’abord un désir d’aider, d’aider l’autre là, je pense que ça c’est la fondation. Il faut avoir de l’empathie puis de la compassion, puis il faut aussi essayer de cultiver du non-jugement. Je veux dire, les gens se présentent à nous tellement vulnérables! Il n’y a personne qui veut voir une travailleuse sociale là (rire), ce n’est pas un objectif de vie. Quand ils viennent nous voir ça ne va pas bien. Il n’y a personne qui veut avoir une thérapie conjugale et familiale là, ils viennent à un moment où ça ne va pas bien. Les gens ont peur, sont épuisés, se sentent jugés, donc c’est notre job de leur faire sentir à l’aise puis confortables, puis en sécurité, puis qu’ils ne vont pas être jugés. Donc il faut vraiment essayer de… de… C’est normal qu’on ait tous du jugement, on est des êtres humains, mais on ne cultive pas cette partie-là là, on ne la pousse pas plus loin, puis on en est conscient aussi.
Aimy :D’avoir cette clarté de « elle est où ma limite » là. Hmmm qu’est-ce que tu dirais qui est ton plus grand défi dans ton quotidien?
Christina :Je pense que ça serait les contraintes du système. En fait dans tous les systèmes là. Par exemple on identifie un besoin chez quelqu’un ou chez une famille, puis on sait ce dont ils auraient besoin, mais ce n’est pas possible. Comme par exemple un psychiatre! Ça c’est comme un exemple très concret là, mais on voit que quelqu’un aurait besoin d’une évaluation psychiatrique, d’un suivi là, puis ça ce n’est pas possible dans l’immédiat, il faudrait attendre six mois, à moins que la personne ait de l’argent pour se payer ça au privé, au moins six mois. Alors ça c’est comme le genre de contraintes qui rend… ça rend ça difficile!
Aimy :Je sais ce qui pourrais servir, mais je ne peux pas le proposer pour tout de suite.
Christina :Je ne peux pas. Ouais ou un autre aussi c’est par exemple en oncologie, bien il y a plusieurs fondations qui aident les patients atteints de cancer parce que le stress financier c’est énorme là, c’est comme le stress numéro un pour lequel les gens viennent me voir. L’impact financier de la maladie : ils doivent arrêter de travailler, puis ils ont des assurances ou pas, éligibles à des programmes d’aide ou pas. Puis là bien selon le type de cancer il y a différents fonds accessibles ou pas donc si on a par exemple un cancer du sein bien il y a plusieurs fondations qui peuvent venir en aide financièrement de façon concrète, mais par exemple si on est diagnostiqué avec un cancer colorectal, il n’y a pas une fondation qui peut venir en aide financièrement. Donc ça c’est difficile pour moi parce que…
Aimy :Des injustices là!
Christina :Oui! Tout le monde est pareil… tout le monde a un cancer ou même une autre maladie! Là je parle juste du cancer, mais il n’y a pas une fondation par exemple pour des patients atteints de X maladie, donc ça c’est difficile là. Quand je vois le besoin financier, puis je le sais que si c’était un autre type de cancer on pourrait faire une telle demande, mais là je ne peux pas.
Aimy :C’est limitant! Puis à l’opposé maintenant, qu’est-ce que tu dirais qui est le plus valorisant, le plus nourrissant pour toi au quotidien?
Christina :Bien de voir les gens, de voir les gens aller mieux, en fait! De savoir que j’ai fait partie d’un processus vers la guérison, qu’ils soient guéris ou non du cancer là, mais que j’aie participé à un changement positif, puis ça c’est dans tous, dans tous les titres que j’ai là! En thérapie aussi c’est tellement valorisant! Bien c’est la raison pourquoi je pense qu’on fait tous ce métier. C’est de voir les gens aller mieux.
Aimy :…De voir ces changements-là! Comment est-ce que tu penses que ton métier va évoluer dans les cinq, dix, quinze, vingt prochaines années?
Christina :Ce que j’espère vraiment c’est que, je sais, je pense que c’est un chantier qui est en construction là, mais j’espère que le titre de psychothérapeute et thérapeute conjugale et familiale va être un titre d’emploi dans le réseau public, parce qu’en ce moment ce ne sont pas des titres d’emplois. Ce sont les travailleurs sociaux qui font des psychologues, mais je pense que ça, ça va vraiment enrichir l’offre au public. Le besoin est là. On sait tous les problèmes de santé mentale comment ils sont présents, alors j’espère que ça va s’en aller dans cette direction-là.
Aimy :Alors si on faisait un peu de ménage pour que les gens voient un peu plus clairement. Encore une fois, je mettrai les liens vers les définitions officielles, mais comment est-ce que tu comparerais la psychothérapie, en fait le titre de psychothérapeute, à celui de psychologue par exemple.
Christina :Bien le titre de psychothérapeute il est relativement nouveau. Ça ne fait pas longtemps qu’il existe, puis il a été créé en fait parce qu’il y avait beaucoup, beaucoup de gens qui s’appelaient des psychothérapeutes, puis là le public était perdu : Qu’est-ce que ça veut dire vraiment là? N’importe qui pouvait s’appeler psychothérapeute.
Aimy :Il y a eu beaucoup de charlatanisme.
Christina :C’est ça, c’est ça. C’est en plein ça pour… c’est la raison pour laquelle le titre a été créé. Donc là pour avoir… je n’ai pas voulu par exemple devenir psychothérapeute. Ce n’était pas comme un objectif parce que ça n’existait même pas ce nom, mais pendant que j’étais dans la formation en thérapie conjugale et familiale, le titre de psychothérapeute est apparu, puis là bien c’est devenu essentiel d’avoir accès à ce titre, parce que j’étais en train d’avoir accès au titre de thérapeute conjugale et familiale, donc je suis allée de l’avant avec ça… mais pour en revenir, c’est ça j’ai comme perdu le fil! Donc pour cette raison, les psychothérapeutes ils viennent de plein de milieux différents. Ça peut être des conseillers en orientation, ça peut être des travailleurs sociaux, psychologues ou des infirmières. Il y a des infirmières qui sont allées vers ça! Donc j’ai l’impression que les psychothérapeutes ont vraiment une diversité d’approches, mais les psychologues, ils viennent… il faut aller étudier en psychologie, donc c’est une certaine approche. Donc je ne pourrais pas dire dans les interventions qu’est-ce qui est différent, mais c’est comme le « feeling » que j’ai en regardant la population admettons.
Aimy :Quelque chose que je constate souvent là quand j’étudie la question avec mes clients, puis tu me diras si ça fait du sens dans ta pratique. C’est souvent que… bon bien exactement comme tu le disais, on peut venir de plein de branches pour atteindre le titre de psychothérapie, je pourrais être conseillère en orientation, sexologue, comme tu le disais, des infirmières en santé mentale, des psychoéducateurs, il y en a plein… il y en plein, il y en a quelques-uns! Je pourrai mettre la liste encore une fois. Puis ce qu’on constate souvent c’est qu’au niveau du besoin de consultation initial, parfois on va aller chercher quelqu’un qui a un angle, donc une approche qui correspond un peu à ce qu’on va rechercher donc si par exemple, là je donne l’exemple de l’orientation parce que c’est celui que je connais le mieux, mais si par exemple quelqu’un vit des burnouts à répétition, on pourrait se dire : « Ah bien si je vais consulter quelqu’un qui est psychothérapeute, mais qui a une approche, donc qui vient de la famille de l’orientation au départ, bien peut-être qu’il y aurait quelque chose encore en lien ici puis que la thérapie pourrait être un peu dans cette angle-là, donc des fois un peu comme une porte d’entrée. Est-ce que ça, ça fait du sens avec quelque chose que tu verrais?
Christina :Que le client…?
Aimy :Oui dans sa recherche initiale là?
Christina :Bien c’est qu’en ce moment, je pense que les clients prendraient n’importe qui, parce qu’il y a tellement, il y a tellement peu de disponibilités pour le nombre de demandes! On sait là que depuis la pandémie ça a explosé puis ça continue, puis donc je ne sais pas si… je pense que dans un monde idéal oui. Peut-être dans le monde d’avant là, mais dans le monde maintenant les gens ils sont juste contents d’avoir quelqu’un là. C’est comme, j’ai remarqué aussi que les gens par exemple les nouveaux clients, je dis mon titre puis que je peux fournir des reçus pour assurances… ils ne veulent pas entendre ça. Ils sont juste contents que je sois disponible.
Aimy :On revient encore à ces grands besoins criants du système là, où on prend ce qu’on peut!
Christina :Ouais, ouais!
Aimy :OK, parfait. Ça fait que oui, c’est ça, donc je te demandais : Comment est-ce que tu penses que ça va évoluer? Tu me dis : J’aimerais que le titre devienne répandu dans le réseau là, que ça ne devienne pas juste quelque chose qu’on peut se payer au privé. Puis quel impact ça aurait que ce soit répandu dans le réseau, selon toi?
Christina :Bien il y aurait, je pense qu’il y aurait moins… bien il y aurait plus de facilité pour les gens à avoir accès aux services, puis il y aurait, il y a des situations où est-ce que les thérapeutes conjugaux et familiaux ils allègent le fardeau des autres professionnels dans le système, parce qu’il n’y a nulle part où les référer actuellement. Bien il y a des listes d’attente là, il y a des petites cliniques dans le système, mais ce n’est pas officiel comme quand on veut être référé à une travailleuse sociale bien on sait le chemin là, tous les médecins puis les infirmières connaissent le chemin, mais pour thérapeutes conjugales et familiales, on ne connait pas puis donc ça allègerait la détresse des gens, ce qui allègerait aussi tout ce qui va autour du traitement. En fait c’est un autre changement systémique. Quand on prend soin de quelqu’un puis de sa famille, bien ils n’ont pas besoin d’être par exemple en train d’envoyer des courriels à l’infirmière tout le temps. Puis les infirmières le voient, elles le disent : On voit une différence quand quelqu’un est suivi en travail social ou pas suivi. Alors si on avait des thérapeutes conjugaux et familiaux, bien il y aurait cette prise en charge qui serait rassurante pour tout le monde en fait.
Aimy :Hmmm mmm, ça serait bon pour le patient puis ça serait bon aussi pour l’équipe multidisciplinaire aussi.
Christina :Oui!
Aimy :Dernière question dans ma grande série de questions : Si quelqu’un te disait qu’il était intéressé par ton domaine, qu’est-ce que tu leur dirais dès maintenant qu’ils pourraient faire pour s’en rapprocher un peu.
Christina :Aller en thérapie! (rires) Non… Ils vont en avoir besoin! (rires).
Aimy :Ouais, ils vont en avoir besoin, ce n’est jamais perdu!
Christina :Bien faire du bénévolat, je pense que c’est… ça apporte, bien ça apporte beaucoup à la personne qui en fait, ça apporte aux autres, mais ça permet d’identifier avec quel genre de population on aimerait travailler, quel genre de tâches. J’ai fait beaucoup de bénévolat, avant. Il y a les stages aussi, mais même avant les stages. Ça aide à cerner là qu’est-ce qu’on aime puis dans quoi on se voit, parce qu’on pourrait être impliqués de plein de façons en travail social, oui.
Aimy :C’est un domaine qui est super large, donc de voir la clientèle, de voir les milieux, de voir le type de tâches, donc de commencer à découvrir ça à travers le bénévolat. Super intéressant! Alors, pour conclure, viennent maintenant quelques questions en rafale, donc en un ou deux mots! Es-tu prête?
Christina :Je ne suis pas bonne à ça.
Aimy :Oui je le sais, tous mes gentils invités en relation d’aide ils détestent ces questions.
Christina :Je ne joue pas à ces questions.
Aimy :J’explique à tout le monde la belle face que j’ai devant moi. qui me dit je ne veux pas jouer à ton jeu, mais qui va jouer quand même.
Christina :Je vais jouer.
Aimy :Voilà! Alors, en un ou deux mots. Le travail, c’est…
Christina :…valorisant!
Aimy :L’école c’est…
Christina :Ah je ne peux pas. C’est platte ou c’est « l’fun »!
Aimy :C’est les deux!
Christina :C’est les deux!
Aimy :La carrière, c’est…
Christina :C’est ma vie!
Aimy :La conciliation travail-vie, c’est…
Christina :Être disponible.
Aimy :Qu’est-ce qui te motive à sortir du lit chaque matin?
Christina :Mes deux réveille-matins de cinq ans et deux ans!
Aimy :(Rires). C’est sûr que c’est une forte motivation ça! Être un adulte, c’est…
Christina :Avoir des responsabilités.
Aimy :Hmmm mmm! On fait des lunchs en des fois? C’est ça qui se passe? Quels conseils est-ce que tu donnerais à Christina que tu croiserais en sortant du bureau là, qui a vingt ans. Qu’est-ce que tu lui dirais?
Christina :Relaxe, ça va être correct!
Aimy :Christina ça a été très très très l’fun, merci!
Christina :Merci oui! Merci!
Aimy :Merci à notre invitée et merci à vous d’avoir écouté cet épisode des portraits professionnels. Pour plus de détails sur cette profession, visitez notre site Internet au www.saltoconseil.com.