OBSTÉTRICIENNE-GYNÉCOLOGUE
AVEC DRE GABRIELLE CASSIR
Janvier 2020 | Musique et montage par Alex Andraos
Dre Gabrielle Cassir est obstétricienne-gynécologue. Elle nous décrit son parcours académique du secondaire jusqu’à sa surspécialisation en grossesses à risques élevés. Elle nous parle des sacrifices qu’elle a dû faire pour se rendre où elle est, mais aussi du privilège qu’elle ressent d’occuper son poste. Nous discutons de son quotidien tant en clinique, qu’en échographie ou en salle d’accouchement; puis, Gabrielle nous fait part de ses conseils pour ceux qui pourraient être intéressés par son domaine.
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OBSTÉTRICIENNE-GYNÉCOLOGUE
AVEC DRE GABRIELLE CASSIRAimy :
Bonjour et bienvenue aux Portraits professionnels, le balado où l’on tente de clarifier différentes professions du marché du travail. Docteur Gabrielle Cassir est obstétricienne-gynécologue. Elle nous décrit son parcours académique, du secondaire jusqu’à sa sur-spécialisation en grossesses à risques élevés. Elle nous parle des sacrifices qu’elle a dû faire pour se rendre où elle est, mais aussi du privilège qu’elle ressent d’occuper son poste. Nous discutons de son quotidien tant en clinique qu’en échographie ou en salle d’accouchement. Puis, Gabrielle nous fait part de ses conseils, pour ceux qui pourraient être intéressés par son domaine. Gabrielle Cassir, bonjour.
Gabrielle :Bonjour.
Aimy :Tu vas bien?
Gabrielle :Très, très bien. Toi?
Aimy :Ça va bien, merci. Alors, on se rencontre aujourd’hui pour parler de ton beau métier. Veux-tu nous dire qu’est-ce que tu fais?
Gabrielle :Je suis obstétricienne-gynécologue.
Aimy :Obstétricienne-gynécologue. Alors, Noël s’en vient bientôt, quand tu vas rencontrer de nouvelles personnes dans un party de Noël et que tu vas dire : bonjour, je suis Gabrielle, je suis obstétricienne-gynécologue, qu’est-ce que les gens imaginent que tu fais de tes journées?
Gabrielle :Oh wow… Je peux dire, je reçois beaucoup de rires. La majorité du monde pensent que je passe la majorité de ma journée à la salle d’accouchement. J’accouche des bébés. C’est en effet vrai, mais c’est pas la grande majorité de mon travail.
Aimy :OK. Fait que, si justement, on essayais de faire une journée typique dans la vie de Gabrielle au travail, de quoi ça aurait l’air?
Gabrielle :Ça, ça serait plus une semaine typique parce que chaque journée diffère. Je passe environ deux jours par semaine en clinique externe où je vois mes patientes enceintes. Moi, je fais surtout de l’obstétrique, mins de la gynéco en tant que tel. Alors, je passe deux journées par semaine à voir ces patientes. Je passe environ une journée par semaine à la salle d’accouchement, vraiment en train d’accoucher des patientes, évaluer des patientes qui viennent à l’urgence. Et une journée par semaine à la clinique de l’hôpital, qui est une clinique de diabète, où c’est moi vraiment qui est la gynécologue à cette clinique. Et une journée par semaine en échographie. Alors, je fais surtout des échographies obstétricales et des échos de datation.
Aimy :Fait qu’on a de la clinique, de la salle d’accouchement et de l’échographie, grosso modo.
Gabrielle :Exact.
Aimy :Fait que, mettons, une journée clinique. Ça a l’air de quoi?
Gabrielle :Une journée clinique, alors moi je ne suis pas vraiment quelqu’un de matinal. Les journées cliniques, c’est les seules journées qui commencent un petit peu plus tard.
Aimy :C’est quoi, un peu plus tard?
Gabrielle :Neuf heures et demie, dix heures.
Aimy :OK.
Gabrielle :Et je travaille habituellement, ça dépend de la clinique, mais je finis quelque part entre cinq heures et demie et sept heures. Alors, c’est des grosses journées.
Aimy :C’est des bonnes journées quand même.
Gabrielle :C’est des bonnes journées de clinique. Je prend environ, si ça convient, je prends des fois quinze minutes pour le dîner et je vois des patientes à la journée longue.
Aimy :Une journée de neuf et demie à sept le soir, ça fait combien de patientes dans ton bureau?
Gabrielle :Alors ça, ça dépend. Comment les patientes sont cédulées, il y a habituellement une dizaine de minutes, dix à quinze minutes allouées à un suivi de grossesse ou des patientes qui viennent vraiment pour leur suivi régulier. Il y a une demi-heure pour les patientes, pour les nouvelles consultations de grossesse ou des nouvelles consultations de gynécologie. Alors, si on essaie de diviser, disons, de dix à cinq, ça fait sept heures…
Aimy :Je te laisse faire les maths là (rire).
Gabrielle :Une trentaine de patientes, disons. Trente quelque par jour?
Aimy :Hum, ça m’apparaît étourdissant.
Gabrielle :(Rire)
Aimy :Il faut aimer ce qu’on fait.
Gabrielle :Il faut aimer ce qu’on fait, puis honnêtement, j’adore mes patientes. Alors, c’est le fun parce qu’il y a différentes personnalités. Tu finis par vraiment connaître tes patientes à la fin de neuf mois. Au début, tu les vois au mois, puis après aux deux semaines rendu à sept mois, puis après ça à toutes les semaines, rendu à huit mois.
Aimy :Fait que, même à trente personnes par jour, ça reste des individus dont tu te rappelles?
Gabrielle :Oui, absolument. Absolument.
Aimy :OK. Fait qu’une journée clinique, ça ressemblerait à ça. Fait qu’il y a des suivis réguliers, sinon qu’est-ce que ça pourrait être?
Gabrielle :Bien, moi, je fais, j’ai fait une sur-spécialisation en médecine fœto-maternelle, ce qui est des grossesses à risques élevés. Alors, moi je reçois vraiment beaucoup de consultations de mes collègues pour des patientes qui ont des complications de grossesse, soit du côté maternel ou soit du côté du bébé. Alors, vraiment, ça me stimule parce que moi j’adore des cas de grossesse un petit peu plus compliqués. J’aime les suivis réguliers aussi, ça fait un bon changement, mais je reçois beaucoup de consultations. Je vois de tout pendant ma journée de clinique.
Aimy :Ça peut avoir l’air de quoi, pour quelqu’un qui n’a jamais eu d’enfant et qui n’est pas vraiment là-dedans, ça peut avoir l’air de quoi une grossesse difficile?
Gabrielle :Alors, une grossesse difficile, il y a vraiment des deux côtés du spectrum. Il y a des grossesses qui sont un peu plus compliquées parce que la mère a des complications comme des problèmes de la glande thyroïde connus ou qui développe un diabète pendant la grossesse parce qu’on peut avoir un diabète transitionnel pendant la grossesse. De l’autre côté, on peut vraiment avoir des complications comme des anomalies du bébé ou un bébé qui est né avec des malformations ou un dépistage génétique qui révèle un risque beaucoup plus élevé. Il faut conseiller la patiente sur c’est quoi les prochaines étapes, est-ce qu’il faut faire une amniocentèse ou il y a vraiment une grosse restriction de croissance qui arrive chez le bébé. Alors c’est vraiment des cas qui sont un petit peu plus légers et d’autres qui sont à risque et d’autres qui sont un peu plus compliqués.
Aimy :OK. Alors, il y a quand même, comme tu dis, un grand spectrum, beaucoup de possibilités de choses qui pourraient un petit peu mal tourner, mais tu as aussi des cas un peu réguliers.
Gabrielle :Exactement.
Aimy :Alors, un suivi de grossesse régulier, ça ressemble à quoi ton travail là-dedans?
Gabrielle :Alors, un suivi de grossesse régulier, on rencontre les patientes habituellement, je dirais aux sept, huit, neuf semaines. Moi, je leur donne vraiment à quoi s’attendre pendant la grossesse. Alors, les visites sont un peu moins fréquentes au début. Comme je vous avais dit, c’est vraiment une fois par mois jusqu’à sept mois, puis après ça aux deux semaines jusqu’à huit mois, puis à huit mois, vraiment à toutes les semaines. Au début, il faut toujours les conseiller, alors première chose qu’il faut leur dire c’est qu’il faut une écho datation. Vraiment bien dater quand a commencé la grossesse pour qu’on leur donne une bonne estimation de c’est quand leur date d’accouchement. Il faut, après ça, avoir toute une discussion sur le dépistage génétique qui diffère. Il y a des tests gouvernementaux qui sont payés par le gouvernement et d’autres qui s’offrent en privé, qui sont des tests qui, oui, coûtent de l’argent, mais qui sont un peu plus sensibles et un peu plus précis pour le dépistage génétique.
Aimy :Tu as comme un rôle conseil, à ce moment-là, quant à qu’est-ce qui pourrait faire, qu’est-ce qui serait le plus recommandable à ce moment-là.
Gabrielle :Oui parce qu’il y a beaucoup de patientes qui arrivent dans mon bureau et qui ont eu ou qui entendent plein d’histoires de leurs amies qui ont accouché et qui disent : « J’ai entendu parler de ce tests, est-ce que ça vaut la peine? Est-ce que je devrais le faire? ». Il y a de plus en plus de patientes que je vois qui sont d’un âge maternel un peu plus avancé et qui veulent absolument ces raisons. Dans le passé, quand j’ai fait mes études, si tu avais en haut de 35, d’emblée c’était une amniocentèse qu’on faisait. Là, il y a plein de tests non invasifs, qui sont des simples prises de sang qu’on peut faire un dépistage génétique. Alors, c’est vraiment une grosse discussion au début. Les patientes arrivent toujours avec plein de questions : « Est-ce que je peux prendre ces médicaments, est-ce que je peux prendre le Tylenol pendant la grossesse? ». Après ça, c’est de les conseiller sur, à 20 semaines, s’il y a une écho d’anatomie et qu’on voit le bébé de la tête aux pieds, puis on évalue de faire son morphologique pour s’assurer que tout est normal. Il y a un test de diabète qui se fait entre 24 et 28 semaines, pour vraiment s’assurer qu’il n’y a pas de diabète de grossesse. Après ça, on leur parle de c’est quand on commence à faire les examens vaginaux, à quoi s’attendre sur quand débutent les mouvements du bébé, c’est quand on peut s’attendre à avoir des petites contractions, qui sont peut-être des fausses contractions de Braxton-Hicks. Les patientes veulent habituellement avoir ces informations-là.
Aimy :C’est comme si, pas à pas à travers la grossesse, tu vas être là pour leur dire à quoi s’attendre, qu’est-ce qui s’en vient, ça c’est normal, ça c’est ce que tu peux faire. Fait que tu es comme un coach de grossesse (rire).
Gabrielle :Un coach, absolument!
Aimy :Un coach, docteur coach (rire).
You got this! (rire) Aimy :C’est bon (rire). OK, ça c’était pour de la clinique, plus régulière ou plus difficile. Si on regardait un peu en salle d’accouchement.
Gabrielle :Ça, c’est des bonnes journées (rire).
Aimy :Le cliché… oui, des bonnes journées. Hum, ça a l’air de quoi, une journée en salle d’accouchement.
Gabrielle :Ça aussi, ça peut vraiment être les deux côtés du spectrum. J’étais de garde mardi et c’était une exception où on a vraiment eu une journée beaucoup plus tranquille où j’ai vraiment pu faire de la recherche parce que je n’avais pas de patiente qui accouchait. Moi, je travaille vraiment dans un centre où on fait le plus d’accouchements au Québec.
Aimy :Tu es où?
Gabrielle :À St-Mary’s. On fait environ ou presque 4000 accouchements par année. Des fois, tu peux vraiment passer une journée à accoucher 10-12 patientes. On est surtout plus occupés, c’est toujours comme ça dans n’importe quel centre hospitalier, l’été c’est surtout quand les patientes accouchent.
Aimy :Les bébés naissent l’été?
Gabrielle :L’été, je ne sais pas, c’est l’été.
Aimy :Les gens sont actifs en hiver. (rire)
Gabrielle :Exactement! (rire) C’est le moment qui est un peu plus occupé. Alors, une journée, habituellement, je commence alors, il y a vraiment des shifts à la salle d’accouchement. Nous, à notre centre, alors moi je travaille, si j’ai un shift de jour, de huit heures à six heures. Mon collègue prend la relève de six heures à huit heures le matin. Alors, on couvre vraiment, quand on est de garde, on a la salle d’accouchement, on a l’urgence obstétricale, où les patientes qui sont enceintes en haut de 20 semaines peuvent se présenter pour éliminer la possibilité qui sont en travail ou ont rompu les membranes ou qui ont n’importe quelle complication de grossesse, elles peuvent se présenter. Et je couvre aussi toutes les urgences qui passent par l’urgence de l’hôpital. Alors, c’est des journées qui sont habituellement très occupées. Ça se peut vraiment qu’on ait deux-trois accouchements en même temps et il faut se déplacer de salle en salle. On a des césariennes électives, qui sont planifiées et c’est vraiment des fois le médecin de garde qui doive les faire. Entre manager les césariennes électives, les patientes qui sont en salle d’accouchement et celles qui se présentent aux urgences, tu as des étudiants, des résidents avec toi, des sages-femmes des fois qui sont des étudiantes, alors tu as vraiment, je peux te dire qu’on n’est jamais « bored » sur la salle d’accouchement.
Aimy :OK, c’est rock and roll.
Gabrielle :Rock and roll.
Aimy :OK. Là tu dis, des césariennes électives, c’est des césariennes que les gens ont choisies eux-mêmes. C’est ça?
Gabrielle :Oui. Aimy :
Ils ont choisi la date, ça va être à ce moment-là?
Gabrielle :Exactement. Soit qu’ils ont déjà eu des césariennes, ils ne veulent pas d’accouchement vaginal ou il y a vraiment une raison obstétricale pour faire la césarienne.
Aimy :Sinon, un accouchement, j’allais dire un accouchement normal puis je ne sais pas ce que çaveut dire un accouchement normal…
Gabrielle :(rire)
Aimy :Mais, habituellement, un accouchement sans complications, ton rôle à toi, ça va être quoi?
Gabrielle :Alors, notre rôle en tant que médecin, c’est premièrement d’évaluer la patiente. Ça serait d’établir d’où on part. Est-ce que c’est une femme qui, comment est-ce qu’elle arrive en travail? Est-ce que c’est une patiente qui est cédulée pour une induction, ce qui est une planification d’accouchement? Et si c’est en fait une induction, il faut décider c’est quelle méthode qu’on va utiliser, expliquer à la patiente c’est ça qu’il faut faire, examiner la patiente, il faut évaluer son col, voir s’il faut certaines modes de maturation au niveau du col avant de simplement leur donner des contractions avec un médicament par intraveineuse. On est là à expliquer étape par étape à la patiente et décider avec la patiente aussi ce qu’elle est prête et ce qu’elle comprend et ce qu’elle anticipe aussi au courant du suivi de l’accouchement. On examine les patientes habituellement, quand elles sont vraiment en travail actif, aux deux heures. On décide, puis on a un suivi très multidisciplinaire. L’anesthésiste est impliqué, puis l’infirmière, qui a un rôle très important dans l’accouchement d’une patiente, qui est vraiment celle qui est beaucoup plus impliquée au niveau personnel avec la patiente.
Aimy :Qui va être présente beaucoup plus longtemps.
Gabrielle :Présente. Absolument. Et on est là à suivre jusqu’à temps que la patiente est à dilatation complète et de là décider, OK, combien de temps qu’on lui laisse et quand est-ce qu’on devrait commencer à pousser. Une fois que la patiente commence à pousser, on prend un rôle beaucoup plus actif à côté de la patiente, à lui coacher, à lui enseigner comment pousser et évaluer est-ce que la poussée se fait bien, est-ce que la descente se fait bien. On suit toujours le petit tracé du coeur du bébé, s’assurer que le tracé est très rassurant pour poursuivre avec un suivi beaucoup plus expectatif. Il y a toujours, une grossesse non compliquée, un accouchement qui se fait très bien, c’est un moment très spécial dans la vie des parents et je pense que c’est ça qui m’a attirée le plus dans ma profession. C’est vraiment accoucher une patiente et être présente pour un moment aussi important dans la vie et vraiment participer à un moment de bonheur et vraiment non comparable.
Aimy :Fait que c’est un rôle qui ne ressemble pas à beaucoup d’autres rôles. C’est comme, il y a comme un morceau de cerise sur le sundae. La femme va faire son travail et quand c’est vraiment le temps, le médecin arrive, puis là tu es là pour ce moment-là qui est historique dans la vie de ces gens-là.
Gabrielle :Absolument.
Aimy :C’est comment de, parce que, oui, je t’entends dire c’est pour ça que j’ai choisi mon travail aussi, c’est fantastique, c’est un privilège que tu as de pouvoir être là? Gabrielle :
Absolument.
Aimy :Mais, c’est aussi une grande responsabilité. C’est comment, de vivre ça?
En effet, c’est vraiment une grande responsabilité et je pense que c’est un gros changement quand tu finis ton entraînement et tu finis tes études et tu deviens la patronne en tant que tel. Les décisions te reviennent à la fin de la journée et des fois tu es vraiment face à face avec une décision qui est un peu plus difficile. Puis, tu as toujours des patientes qui sont plus anxieuses que d’autres patientes et qui ont besoin d’un petit peu plus de TLC. Oui, c’est une grosse responsabilité, mais je pense que toutes les années de formation qu’on a faites te donnent en effet les habiletés à vraiment « rise to the challenge ». Aimy :Tu arrives préparée là.
Gabrielle :Tu arrives préparée. C’est sûr qu’il y a toujours des moments qui te prennent par surprise des fois, mais tu as vraiment une bonne formation qui te permet vraiment, c’est ça, « rise to the challenge ».
Aimy :Tu arrives solide là.
Gabrielle :Absolument.
Aimy :On arrive, qu’est-ce qui nous manquait, l’échographie. De quoi ça a l’air, une journée en échographie?
Gabrielle :Moi, j’adore l’échographie, alors pour moi, c’est vraiment des journées que j’ai toujours aimées. L’échographie, c’est très, très, très occupé. J’ai fait une journée d’échographie hier, j’étais là de huit heures du matin, je suis partie à sept heures du soir. Alors, tu vois plein de patientes et encore là, c’est des échographies qui diffèrent. C’est des écho de datation au très début de la grossesse. Tu as des échos de dépistage génétique qu’on fait et vraiment de datation, de s’assurer qu’il n’y a pas d’anomalie précoce chez les bébés. Après ça, tu as vraiment des échos plus détaillées, des échographies d’anatomie qui se font à la moitié de la grossesse, à 20 semaines et des échos de croissance qui se fait plus tard à 32 semaines, qui est environ sept mois. J’ai, tu as du suivi régulier, mais tu as aussi malheureusement, des fois, des suivis où il y a des complications fœtales, des anomalies que tu finis par dépister, des retards de croissance, des patientes qui se présentent parce qu’on a eu une découverte fortuite d’un col qui est plus court qu’on envisagerait. C’est beaucoup de counseling qui se fait à ce moment-là. Comme je vous disais, moi je fais des grossesses qui sont un peu plus compliquées, alors je reçois des consultations de mes collègues, pour des cas qui sont un peu plus complexes. C’est des moments qui sont très accueillis par les patientes et très attendu parce que c’est toujours spécial de voir ton bébé pour la première fois. Mais, c’est aussi, des fois, quand tu suis une patiente pour un cas un peu plus complexe, c’est toujours anxiogène pour la patiente qui vient en échographie. Tu passes vraiment beaucoup de temps à rassurer les patientes et à leur expliquer, leur montrer c’est ça que je vois, est-ce que vous le voyez? Est-ce que vous le voyez? Je passe un peu plus de temps et je leur explique avec un peu plus de détails ce qui s’en vient. Aimy :
Fait qu’il y a comme cette délicatesse, je suis consciente que ce n’est pas facile à entendre.
Gabrielle :Absolument. Il faut être consciente. Il faut être consciente parce que, pour nous, c’est peut-être quelque chose qu’on voit à toutes les semaines ou à tous les mois, mais pour une patiente qui en fait l’expérience pour la première fois et personne ne veut jamais entendre qu’il y a quelque chose qui diffère de la normale pendant la grossesse. Il faut prendre le teos de vraiment s’assurer que la patiente comprend exactement ce qu’on fait et les rassurer en même temps. Elles veulent entendre qu’il y a quelqu’un qui est là pour elles et qu’il y a quelqu’un qui comprend vraiment les émotions qu’elles sont en train de ressentir.
Aimy :Sans rentrer dans quelque chose de super politique, notre système de santé est ce qu’il est. On dit qu’il faut prendre le temps dans ces cas là et on sait que le temps est difficile à prendre parce que le temps, il est court. J’ai l’impression, parfois, que les médecins sont un peu pris entre l’arbre et l’écorce, je veux bien faire mon travail, mais je n’ai pas beaucoup de temps pour le faire. C’est comment, cette dualité-là, pour toi?
Gabrielle :Oh wow… Ça, c’est honnêtement une très bonne question parce que c’est quelque chose qui a été très difficile pour moi au début quand j’ai commencé comme patronne. Je suis quelqu’un qui adore passer du temps avec mes patientes et je pense que quand toi tu deviens une patiente et que tu vois un médecin, tu réalises, je pense que le pire en tant que patiente, c’est quand tu rentres dans ton bureau de médecin et que tu quittes en ayant plus de questions ou presque aucune de tes questions qui ont été répondues. Tu quittes un peu plus incertaine et aucunement rassurée. Alors, je trouve que ma volonté a toujours été de passer du temps avec une patiente, puis j’essaie le plus que je peux, mais il y a des fois des obligations hospitalières qui sont parfois hors de notre contrôle. Il y a certaines obligations, dans les hôpitaux et même dans les cliniques à voir un certain nombre de patients. Il y a des cédules et des listes d’attente qu’il faut essayer de diminuer. Alors, en essayant de balancer tout ça, des fois, il y a vraiment des obligations. Tu as des patientes qui, pour une échographie, il faut les booker aux 20 minutes et il faut que ça passe, il faut que ça dure ce temps maximal et il faut rentrer 40 patientes par jour, disons. Il y a vraiment des obligations qui, malheureusement, c’est quelque chose d’administratif, logistique et nous, en tant que médecin, on n’a pas beaucoup, même si c’est notre clinique et même si c’est nous, à la fin de la journée, qui…
Aimy :Qui la gérez.
Gabrielle :Qui finisse, à la fin de la journée, à la gérer, c’est vraiment des obligations qui nous sont imposées.
Aimy :C’est comme si la pression qui est vécue par le patient est aussi vécue par le médecin.
Gabrielle :Absolument. Puis, même dans ma pratique en clinique, tu as des obligations à voir des patientes. Il y a des patientes, il faut que tu les voies à toutes les semaines. Si tu es bookée à dix heures du matin à quatre heures du soir, il faut quand même que tu trouves un moment à voir ces patientes parce que c’est une nécessité au niveau du suivi de grossesse. C’est pas comme si c’est quelqu’un qui se présente pour un suivi annuel et que tu pourrais les céduler n’importe quand. Alors, il y a des fois certaines urgences ou certaines obligations qui te forcent à, il faut que je place ma patiente quelque part et l faut que je trouve du temps. C’est ça que j’ai vraiment compris quand j’étais une patiente, je comprends pas pourquoi je vais au médecin et que j’attends une heure et demie ou j’attends deux heures, c’est ridicule. C’est parce qu’on a tellement de patientes à mettre dans notre cédule et trouver du temps à voir tout ce monde que, des fois ça vient un petit peu plus compliqué que les gens le réalisent. Des fois, tu peux avoir des suivis qui te prend cinq minutes et d’autres où la patiente arrive avec, ça arrive plus souvent que je pense, mais une liste de questions qui, des fois, ça te prend pas cinq minutes. Ça peut prendre 20 minutes, 25 minutes, alors c’est des fois difficile à prévoir.
Aimy :C’est comme un casse-tête à gérer, vraiment, au niveau logistique. Mais j’entends cette pression partagée. La personne n’est pas contente d’attendre une heure et demie et toi, si c’était ton souhait, elle n’attendrait pas une heure et demie.
Gabrielle :C’est toujours mon souhait.
Aimy :Mais, on fait ce qu’on peut.
Gabrielle :Absolument. Il faut essayer de faire ce qu’on peut.
Aimy :Fait que là, on a regardé un peu les trois volets, que ce soit en clinique, que ce soit en salle d’accouchement ou que ce soit en échographie. Fait qu’on a vu un peu le portrait général du day to day de Gabrielle. Je me demande maintenant, il y a comme un rythme soutenu dans ce que tu me décris. J’entends un très grand nombre de patients, j’entends beaucoup d’heures, j’entends 15 minutes pour luncher. Je sais que c’est pas tout le monde qui serait prêt à vivre dans ces conditions-là. C’est sûr qu’on est rapide à dire, ah les médecins ils ont un gros salaire. Oui, bien sûr, mais reste que c’est difficile à soutenir à long terme. C’est une carrière, c’est jusqu’à 65ans, si c’est pas plus tard. Qu’est-ce qui t’a amenée à faire ce choix-là de carrière?
Gabrielle :C’était pas nécessairement un choix de carrière où j’ai pris la décision quand j’étais très jeune. J’avais fais mes études, mon secondaire à Charlemagne et après, je suis allée au cégep, puis honnêtement au cégep, moi j’avais toujours l’idée que j’allais rentrer dans le domaine de la communication et journalisme. Ça, c’était mon intention au début parce que j’avais toujours adoré le domaine de la communication et j’avais travaillé dans le passé à CTV. C’est quelque chose qui m’a vraiment, puis même aujourd’hui, c’est quelque chose qui est une grande passion pour moi. J’ai fini par prendre un cours de biologie au cégep. Le seul cours de biologie que j’ai pris, ça m’a tellement impressionnée, je me rappelle quand même du professeur qui était là, à qui, dix ans plus tard j’ai réussi finalement à dire un gros merci parce qu’elle m’a tellement transmis sa passion pour ce qu’elle faisait et ce qu’elle enseignait que j’ai fini par vraiment découvrir une passion pour la biologie. J’avais les notes à l’école pour pouvoir rentrer en médecine et je me suis dit, pour moi ça valait la peine parce que je ne voulais jamais me dire : Ah! j’aurais dû essayer. Alors, je suis rentrée en médecine et j’étais chanceuse, j’ai pu faire la pré-médecine au lieu de devoir faire un undergrad. Alors, à travers mes études, j’ai vraiment découvert une grosse passion pour l’obstétrique et la gynécologie.
Aimy :Les études de médecine ne sont pas toujours claires pour tout le monde, alors tu as fait pre-med?
Gabrielle :J’ai fait pre-med.
Aimy :Alors, ça c’est un an hein?
Gabrielle :C’est un an, mais c’est pas toujours le cas. Il y a certaines personnes qui doivent faire un undergrad, donc un undergrad de trois ans.
Aimy :Donc, un bac au départ.
Gabrielle :C’est ça et qui doivent, et qu peuvent rentrer en médecine et qui peuvent réappliquer en médecine par la suite.
Aimy :Dans ton cas, tu as fait un peu la ligne droite, tu as fait un an de pre-med et ensuite, tu étais directement en médecine.
Gabrielle :Exactement.
Aimy :Là, tu as fait le programme général de médecine?
Gabrielle :Oui, c’est quatre ans.
Aimy :Quatre ans, suite au pre-med.
Gabrielle :Oui.
Aimy :À ce moment-là, tu me dis : « J’ai découvert l’obstétrique ». Ça vient quand, ça? Est-ce que depis le début on commence à toucher à l’obstétrique?
Gabrielle :Non, en fait, tu fais ton pre-med, tu fais vraiment une revue de la science de base. Vraiment moléculaire, pharmaceutique. Après ton pre-med, tu commences à faire vraiment la médecine par système. Tu fais ton cours d’obstétrique, ton cours de pédiatrie, ton cours de cardiologie et c’est vraiment des cours théoriques. C’est très difficile et je le dis souvent aux étudiants que je croise, c’est très difficile de découvrir si c’est un métier, une profession, une spécialité que tu aimes jusqu’à temps que tu rentres vraiment pratico-pratique. Tu peux aimer quelque chose en théorie, jusqu’à temps que tu rentres et tu fais vraiment un stage dans un domaine et que tu passes une journée dans la vie d’une obstétricienne, ou d’un pédiatre ou d’un cardiologue ou d’un neurologue, c’est très difficile d’imaginer. Alors, tes deux premières années de médecine sont vraiment des cours théoriques.
Aimy :Dans ton cas à toi, tu as fait ces deux premières années-là, tu as touché à l’obstétrique, entre autres, en théorie et là tu dis : « J’ai comme eu une piqûre pour l’obstétrique ».
Gabrielle :Ça et la pédiatrie.
Aimy :Ça et la pédiatrie. C’est comme connexe hein?
Gabrielle :J’adore les enfants. C’est déjà quelque chose à la base que j’aimais.
Aimy :Alors comment, est-ce que tu as eu un stage? Qu’est-ce qui t’a amenée à être touchée un peu?
Gabrielle :Oui, alors tu découvres que ce t’aimes un peu plus que d’autre. Moi, j’ai commencé par un stage électif. J’avais des stages à option que j’ai pris et que j’avais décidé de prendre en obstétrique avant de commencer mon stage obligatoire en obstétrique-gynécologie. Moi, j’ai été très chanceuse, mon premier stage à option était offert à Miami. Alors, je l’ai fait à l’Université de Miami et vraiment, j’ai, c’est la première journée et la première fois que j’ai accouché un bébé, c’est la journée que je suis rentrée à l’hôpital à Miami. Le patron me regardait, l’infirmière m’avait amenée rencontrer le patron qui était de garde cette journée-là. Il m’a regardé et il m’a dit, il m’a même pas dit bonjour, il m’a dit : « As-tu déjà accouché un bébé? ». J’ai dit, non et j’étais là, vraiment, même pas en scrub, j’avais probablement mes petits talons et mes habits civils. Il m’a dit : « C’est une journée parfaite pour le faire pour la première fois ». Il m’a pris par la main. Il m’a dirigée vers une chambre avec une patiente qui était en train d’accoucher, en train de pousser, que je l’ai rencontrée pour la première fois. Il m’a dit : « Mets des gants et vas-y ». Vraiment, c’était l’une des meilleures expériences que j’ai eues de ma vie, l’une des plus excitantes. J’avais aucune idée de ce que je faisais, mais j’avais le patron qui était à côté de moi. Mais, je me rappelle le sentiment que j’avais en voyant cette femme qui était en train de pousser et son mari qui était à côté d’elle et juste le… vraiment, les émotions qui étaient dans cette salle et la beauté de pouvoir dire que j’avais amené un bébé dans le monde. J’avais un couple en face de moi qui tenaient leur bébé et qui pleuraient en même temps et juste ce sentiment de… vraiment c’est la première fois de ma vie que j’ai réalisé que des fois, c’est pas toi qui décides quel chemin tu vas prendre. Des fois, c’est choisi pour toi. J’avais vraiment cette impression en accouchant ma première patiente que c’était quelque chose qui m’a vraiment attirée vers l’obstétrique.
Aimy :Un peu meant to be.
Gabrielle :Meant to be.
Aimy :C’est un peu tombé comme ça, tu es un peu tombée dans la soupe.
Gabrielle :Absolument.
Aimy :Mets tes gants, c’est maintenant.
Gabrielle :Mets tes gants, let’s go, c’est la journée pour le faire. You got trust into it. Vraiment, j’ai que d.couvert des choses que j’aimais dans la gynécologie et dans l’obstétrique.
Aimy :Tu étais lancée.
Gabrielle :Oui.
Aimy :Qu’est-ce que tu dirais qu’il faut comme qualités pour être une bonne médecin obstétricienne?
Gabrielle :Hum… Alors, je pense qu’il faut absolument et ça, c’est pour tous les médecins et pas seulement obstétriciens, il faut savoir, il faut être empathique. Il faut être empathique envers tes patientes, il faut avoir un certain degré de confiance en soi aussi, à pouvoir prendre des décisions quand tu en as besoin.
Aimy :C’est toi qui tranche à la fin.
Gabrielle :Exactement. Et pouvoir diriger tes patientes et aussi savoir à impliquer tes patientes dans les décisions en même temps. Je pense que ça prend un petit peu de courage en même temps parce que c’est pas un parcours qui est facile, devenir médecin. Puis c’est pas un parcours ou un travail qui est facile. C’est un travail qui est plus souvent que d’autres, stressant. C’est beaucoup de travail, c’est beaucoup d’années d’études et il faut, selon moi, être passionné à la fin de la journée. Il faut aimer ce que tu fais.
Aimy :Il faut cette passion là, mais j’entends aussi, il faut les reins solides.
Gabrielle :Il faut les reins très solides.
Aimy :Tu ne peux pas juste te dire comme, ah oui, ça va être difficile mais je vais le faire quand même. Ça va être difficile.
Gabrielle :Absolument, ça va être difficile.
Aimy :Et ça va rester difficile.
Gabrielle :Il faut le savoir, mais il faut… Ça reste difficile. Il y a toujours un challenge. Je pense que c’est la beauté de ce qu’on fait aussi, tu ne sais jamais ce que la journée va apporter. Tu n’as vraiment aucune idée des fois quand tu rentres qui va se présenter en face de moi, c’est quoi la consultation que je vais avoir, quelle patiente qui va arriver à l’urgence, quelle patiente qui va arriver en travail et c’est aussi, je le dis très souvent à mes étudiants, il y a jamais ou très rarement un accouchement qui ressemble exactement à un autre. Tu as des patientes qui sont différentes, des cas cliniques qui sont différents.
Aimy :Fait que dans les qualités que tu nommais, c’est comme si j’entendais vraiment la flexibilité aussi. Tu peux pas te dire, ah c’est comme ça qu’on fait. Ça pourrait être différent dans cinq minutes.
Gabrielle :Il faut pouvoir s’ajuster dans différents scénarios. Il faut le savoir. Puis, il faut aussi te garder, garder à jour tes compétences aussi. La médecine évolue à tous les jours.
Aimy :À toutes les secondes.
Gabrielle :À toutes les secondes et oui, il faut savoir que tu as des compétences et plein d’années d’étude et ça devient très facile de…
Aimy :T’asseoir là-dessus.
Gabrielle :…faire ce que tu as toujours fait, mais il y a toujours quelque chose qui évolue en médecine. Alors, il faut savoir vraiment comment garder à jour tes connaissances, tes compétences et tes habiletés.
Aimy :Qu’est-ce que tu dirais qui est le plus difficile dans ton travail?
Gabrielle :Présentement ou pendant ma formation?
Aimy :Mettons qu’on fait les deux?
Gabrielle :(Rire) Je vous dirais, pendant ma formation, c’est définitivement, je pense que c’est le sacrifice que tu fais. C’est des longues, longues heures de travail. C’est des shifts de 24 heures. C’est des shifts où est-c que tu es pris à l’hôpital, surtout dans ma profession, en obstétrique, c’est pas comme si tu faisais des gardes à domicile. C’est des gardes à l’hôpital où tu passes 24 heures à l’hôpital, où tu rentres chez toi parfois un zombie le matin, où tu as pas vraiment réussi à aller à ta chambre de garde. C’est des moments où, tu sais il y a des jours de Noël ou la veille de Noël où tu es pris à l’hôpital, où il y a ta famille qui se rencontre et c’est des petits moments de la vie que tu manques et tes partys des anniversaires. Ça a été difficile pendant la formation. Puis, tu as aussi des moments où est-ce que c’est quelque chose que tu aimes moins, mais c’est comme ça dans la vie aussi. Il faut essayer des choses pour savoir ce que tu aimes. Alors, je pense que c’est le sacrifice que tu fais pendant ta formation et les heures que tu passes au travail, c’est ¸a qui est plus difficile. On s’entend que patronne, présentement, la chose la plus difficile, je pense que c’est de réussir à trouver, moi j’ai toujours été quelqu’un qui a réussi à trouver une balance entre ta vie personnelle et ta vie professionnelle. Je trouve que, en tant que patronne et en tant que médecin obstétricienne, des fois c’est un peu difficile à gérer le tout. C’est difficile à se déconnecter complètement. Je suis quelqu’un qui adore voyager et qui adore prendre, je trouve qu’on travaille très fort, mais le contraire est vrai aussi. Il faut prendre du temps à soi-même, il faut prendre du temps à profiter de la vie et il faut trouver cette balance. J’ai toujours été quelqu’un qui a réussi à trouver une balance, je pense, entre ma vie personnelle et ma vie professionnelle, mais je trouve qu’il y a toujours des obligations et quand tu deviens patronne, tu as certaines, tu n’es plus une résidente, il n’y a personne qui te surveille. Toi, à la fin de la journée, tu as des patientes qu’il faut que tu t’en occupes, il y a des résultats qu’il faut que tu suives. Toi, tu pars en vacances, mais il y a des grossesses qui continuent d’évoluer, des complications qui se font. Ça arrive très souvent où je pars et je reçois un téléphone sur mon cellulaire d’une patiente, oh docteur Cassir, il y a cette complication. C’est très difficile, des fois, de vraiment réussir à se déconnecter complètement. Mais, je trouve que c’est important de le faire et de se rappeler qu’il faut garder une certaine séparation entre les deux.
Aimy :Puis, à l’opposé, qu’est-ce qui est le plus valorisant, agréable, nourrissant dans ton travail?
Gabrielle :Probablement, la reconnaissance de mes patients. Juste voir le bonheur que tu leurs apportes au fil de la journée et les petits sourires et les visites après qu’une patiente a accouché en post-partum, mais aussi les gros « Merci docteur Cassir, tu sais pas comment ». Anyways, les compliments qu’ils te donnent, et juste la passion que tu vois et le bonheur sur ces visages.
Aimy :Il y a une réaction directe. Tu le vois tout de suite, le résultat du travail, il est là.
Gabrielle :Tu le vois. Tu ne peux pas cacher ces émotions d’une patiente qui, vraiment, c’est des gros moments dans une vie et de pouvoir même jouer un petit rôle là-dedans est très valorisant. Vraiment.
Aimy :J’ai envie de te poser une dernière question pour clore. Non, c’est pas vrai, c’est pas la dernière, c’est l’avant-dernière. Comme tu disais, la médecine évolue à tous les jours. Dans les cinq, dix, quinze, vingt prochaines années, comment tu penses que ton métier va évoluer?
Gabrielle :Alors, je pense que ça commence tranquillement. Je pense qu’il y a eu tellement d’évolution surtout au niveau des tests, comme on parlait avant, de dépistage prénatal génétique qui s’offrent. Il y a tellement de possibilités d’extraire des cellules du bébé. Une simple prise de sang dans la circulation de la mère et je pense qu’il y a tellement de nouveaux tests qui se mettent sur le marché, tellement de possibilités qu’on pourra ouvrir pour éviter les gestes un peu plus invasifs qu’on faisait pasr le passé. En échographie, ça c’est vraiment un gros développement au cours des dernières années. Il y a tellement de possibilités échographiques, la précision et les détails qu’on est capable de maintenant voir en échographie. Vraiment, les structures, moi je rigole à chaque fois que j’ai la mère d’une patiente qui arrive et que j’ai la mère qui est en train de voir les images et qui me dit toujours : « Tu sais, dans mon temps, on voyait même pas ça, on était même pas capables ».
Aimy :C’était pas clair.
Gabrielle :Exactement. Mais là, on est capables de faire des échographies 3D, 4D et c’est vraiment donner cette impression spatiale au niveau de certaines structures fœtales, c’est tellement impressionnant. On a même des chirurgies robotiques qui sont en train de se faire où c’est vraiment des robots managés et dirigés par des médecins, mais qui apportent tellement de précision chirurgicale que, peut-être d’ici 15 ans, ce serait peut-être toutes des chirurgies robotiques, des échographies qui maintenant, j’avais juste vu ça la semaine dernière, c’est en fait mon père qui me l’a montré, il me l’a envoyé sur mon cellulaire. Une échographie portable qui se plogue directement dans ton cellulaire, que le médecin peut utiliser et voir les images directement de son cellulaire au bureau avec tellement de précision, la qualité des images, ça m’a impressionnée énormément.
Aimy :Toutes ces avancées-là au niveau de la prédiction, de voir à l’avance…
Gabrielle :Le dépistage.
Aimy :Toutes ces avancées-là, quel impact il va avoir sur ton métier?
Gabrielle :Je pense que ça va devenir de plus en plus important dans la façon qu’on conseille nos patientes et dans les options qu’on leur présente.
Aimy :Parce qu’avec de plus en plus de choix, il y a un plus en plus gros casse-tête là. Qu’est-ce que je choisis si j’ai encore plus d’options?
Gabrielle :Exactement. Dans les années présentement, il y a tellement de patientes qui arrivent dans nos bureaux, on le fait, je le fais, tout le monde le fait, oh j’ai fini par mettre dans Google quelque chose et on a tellement de choses qui ne sont pas nécessairement peut-être les meilleures sources d’information, mais qui sont là à la disposition des patientes et les patientes arrivent avec des idées pré-construites, c’est ça que j’ai entendu. À la fin de la journée, ça revient, oui, c’est notre rôle en tant que médecin à pas nécessairement prendre la décision pour la patiente et à pas nécessairement à impliquer notre opinion non plus, mais à préciser de façon éclairée et concise et détaillée toutes les options qui s’offrent.
Aimy :Comment un rôle éducatif un peu.
Gabrielle :Oui, exactement. Éducatif envers les patientes, je trouve que ça va devenir de plus en plus important dans la façon qu’on accueille, dirige et vraiment comment on parle et qu’on discute avec nos patientes.
Aimy :Alors, maintenant, la vraie dernière question, quel conseil tu donnerais à quelqu’un qui serait intéressé par ton domaine?
Gabrielle :Je pense que le plus gros conseil que je donnerais, c’est de vraiment se lancer dans la médecine pour les bonnes raisons, de prendre la décision de façon vraiment réfléchie et éclairée. Si c’est une passion que tu as et que c’est quelque chose que tu le fais à la base à cause d’un intérêt et d’une passion intrinsèque, absolument, fais-le.
Aimy :C’est quoi, une pas bonne raison?
Gabrielle :Je pense, des fois, il y a du monde qui le font pour des pressions familiales ou monétaires. Il y a des parents qui sont en médecines qui pensent que c’est le domaine qu’ils doivent poursuivre. Mais, pour moi, c’était 12 ans d’études. C’est un parcours qui est difficile. C’est un parcours qui, on ne connaît pas tous les détails de la profession non plus. Moi, j’ai fini dans une cohorte où on était 11 filles et des 11 filles, je ne vous dis pas que c’est toutes par choix, mais il y a certaines qui ont décidé de repartir dans leurs régions différentes.
Aimy :Onze filles, c’est parce qu’il y avait des garçons aussi? Ou 11 filles parce qu’il n’y avait que des filles?
Gabrielle :Non, on était 11 filles en fait dans ma cohorte.
Aimy :C’était une cohorte de femmes.
Gabrielle :Dans le domaine de la gynéco-obstétrique, il y a de moins en moins d’hommes. Je trouve ça surprenant parce que dans le temps de ma mère et de ma grand-mère, il y avait beaucoup d’hommes gynécologues et plus récemment, il y a beaucoup plus de femmes qui deviennent gynécologues. Je ne sais pas comment ça se fait.
Aimy :C’est une bonne question ça aussi.
Gabrielle :C’est une bonne question, mais on a vraiment fini, 11femmes. Et des 11 femmes, on est deux qui se sont installées, qui sont restées à Montréal. Des détails de la profession, quand tu fais tes études, il y a personne qui t’explique des fois que pour rester dans la ville de Montréal et pour travailler dans un centre, dans une ville urbaine, ça te prend minimum une et la majorité du temps, deux ans de sur-spécialisation. Alors, tu fais tes dix ans de médecine, tu finis, si tu fais une spécialisation. Si tu fais de la médecine générale, c’est sept ans. Si tu fais une sur-spécialisation, c’est dix ans d’études et pour travailler dans un centre ici à Montréal, il faut que tu fasses une à deux années de plus et si tu n’as pas la passion qui est là à la base et pouvoir perdurer toutes ces années et faire les heures de travail qu’on fait, il faut aimer ce que tu fais. Et il faut avoir une certaine solidité personnelle.
Aimy :Ça prend une flamme là.
Gabrielle :Oui, il faut une flamme, il faut. Il faut aimer vraiment ce que tu fais. À la fin de la journée, moi j’adore ce que je fais. Il y a tellement de beauté dans la profession. Il y a tellement de bonheur que tu vas, moi peut-être un peu plus que la majorité des autres professions, c’est vraiment un honneur d’être gynécologue et j’aime, il faut aimer aller au travail à tous les jours. Il faut, il faut. Alors, ça c’est vraiment un des conseils, c’est vraiment avoir et trouver ta passion. C’est vraiment trouver quelque chose qui réussira à garder cette passion au courant de tes années de profession.
Aimy :Gabrielle, ça a été super intéressant. Merci beaucoup.
Gabrielle :Merci.
Aimy :Merci à notre invitée et merci à vous d’avoir écouté cet épisode des Portraits professionnels. Pour plus de détails sur cette profession, visitez notre site internet au www.saltoconseil.com.