ACUPUNCTEUR
AVEC CHRISTIAN VYBOH
Janvier 2019 | Musique et montage par Alex Andraos
Plusieurs raisons amènent les gens à consulter en acupuncture;
pour une douleur aigue, pour des symptômes d'une maladie chronique, par prévention, pour maintenir un bien-être global, et parfois par simple curiosté. Nous rencontrons Christian Vyboh, acupuncteur, pour en apprendre un peu plus sur cette médecine traditionnelle.
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ACUPUNCTEUR
AVEC CHRISTIAN VYBOH
Aimy :
Bonjour et bienvenue aux portraits professionnels, le balado où l’on tente de démystifier certaines professions du marché du travail. Aujourd’hui, on rencontre Christian Vyboh, acupuncteur, pour essayer d’en comprendre un peu plus sur cette médecine traditionnelle. Christian, bonjour.
Christian :
Bonjour Aimy.
Aimy :
Comment vas-tu?
Christian :
Ça va très bien, merci.
Aimy :
Donc, aujourd’hui, je voulais que tu puisses nous clarifier un peu ce que tu fais au quotidien, par différentes questions. Je voulais commencer par te demander, pour illustrer ton quotidien professionnel ou quelque chose d’inhabituel, est-ce que tu aurais une anecdote à nous raconter?
Christian :
Oui, je peux raconter l’anecdote et cette anecdote-là, c’est un peu quelque chose qu’on rencontre au quotidien, dans la pratique. Par exemple, quelqu’un vient pour un traitement. Donc, on m’a appelé, il a pris rendez-vous et sur la fiche, par exemple, c’est écrit j’ai mal au doigt. Ok, mal au doigt, c’est correct. Donc, je me prépare un peu, je reçois la personne et finalement on découvre qu’il y a une douleur au doigt depuis un certain temps et que ça a été causé par telle et telle chose. On pose un peu de questions et finalement, on se dit il y a eu un accident d’auto, il y a eu différents événements, il y a eu des douleurs au coude, à l’épaule. Puis finalement, il y a aussi des allergies. Il y a aussi des problèmes au niveau digestif…
Aimy :
Fait que de fil en aiguille…
Christian :
Oui, on ouvre un portrait de la personne finalement, puis c’est ce qui est vraiment intéressant. La base de cette médecine-là, c’est qu’on va prendre ce que la personne dit pour ouvrir une porte sur ce qui est présent en dessous de ça. Donc, la douleur au doigt va devenir tout un spectre que la personne, probablement, ne sait pas qu’elle peut se faire traiter à l’acupuncture. Souvent, ce qu’on va voir, au fil des séances pour cette personne-là, puis comment ça va? Comment ça a été? Écoute, la douleur au doigt, c’est vrai, je n’ai plus vraiment mal. Ça devient comme quelque chose de secondaire. Puis en passant, la digestion ça va mieux, puis les poumons ça va mieux, puis telle et telle chose, ça va mieux. Souvent, c’est des belles surprises pour les gens qui découvrent que ça ratisse large. C’est un soin qui ratisse large.
Aimy :
Cette anecdote-là, tu dirais que c’est comme un profil type? Quelqu’un qui vient te voir pour un bobo, un truc, puis en passant au travers l’éventail des possibilités, on se rend compte qu’il y a d’autres sphères, d’autres problèmes qui pourraient être traités par l’acupuncture?
Christian :
Tout à fait. Exactement. Souvent, les gens vont s’attendre un peu à ça, mais souvent, on est surpris aussi. Aussi, si les gens sont surpris par les connections que je pourrais faire entre les différents symptômes, entre les différentes choses, et ça amène souvent une lumière différente sur la situation. Ça amène la personne à conscientiser quelque chose puis à avoir une autre vision et d’autres outils pour travailler avec cela. C’est assez typique comme situation.
Aimy :
Ok. Je suis rentrée pour problème A, mais j’ai fini par régler A, B, C, D, E…
Christian :
F, G, H, I, J, puis tout ça. Effectivement. C’est vraiment une porte d’entrée, le symptôme, pour voir quelque chose qui est beaucoup plus large que ça.
Aimy :
C’est intéressant dans l’anecdote que tu présentes, la personne rentre avec une vision de ce que ça peut être, l’acupuncture, mais se rend compte que, finalement, ça ouvre la porte sur un paquet d’autres possibilités. Quand on regarde cette vision-là, admettons que tu est dans un 5 à 7 et que tu rencontres quelqu’un pour la première fois, qu’est-ce que tu fais Christian dans la vie? Ah je suis acupuncteur. Qu’est-ce qu’eux voient dans leur tête, à ce moment-là, à ton avis?
Christian :
Dans un 5 à 7, il a deux types de gens. Des gens qui vont être très excités, qui connaissent ça. Et des gens qui vont faire une drôle de face, ah ouin acupuncteur? Ça révèle justement le mystère derrière ça. Je te dirais, la vision de l’acupuncture, de plus en plus c’est connu, honnêtement. Ça fait environ 30-40 ans que c’est rentré au Québec, c’est rentré en Europe depuis le siècle passé et c’est quelque chose qui est là sur la terre depuis longtemps, depuis des milliers d’années. Dans l’éducation populaire, c’est de plus en plus connu. C’est vraient super, mais quand même, les gens qui n’ont jamais expérimenté, ils vont avoir accès à des films, à des genres de parodies. Et qu’est-ce qu’on voit? On voit quelqu’un qui met des aiguilles. Essentiellement, c’est ça aussi l’acupuncture, c’est pas d’autre chose. Mais d’un certain point de vue, la personne arrive et met des aiguilles sur des endroits dans le corps puis apparemment, il y a comme une logique derrière ça, on ne sait pas trop. La personne semble savoir ce qu’elle fait puis en même temps, c’est vraiment ok, pourquoi des aiguilles à tel et tel endroit?
Aimy :
Presque magique.
Christian :
Il y a une dimension un peu magique à cette chose-là. Effectivement, et c’est un peu la deuxième partie de la réponse. Tu me demandes ce que les gens voient, c’est un peu ça de l’extérieur. Puis de l’intérieur, qu’est-ce que c’est l’acupuncture, de un, c’est une médecine. C’est une pratique qui sert à traiter des conditions, à amener une amélioration au niveau de la santé physique, mais aussi au niveau de la santé émotionnelle. C’est vraiment le propre de la médecine chinoise de faire des liens très proches entre la santé physique et la santé émotionnelle.
Aimy :
Donc l’origine, c’est vraiment la médecine chinoise?
Christian :
Oui, exactement. En fait, c’est bon que tu le nommes, l’acupuncture, en fait, ça vient de la médecine chinoise. Donc quand je dis ça, médecine chinoise, donc ça vient de la Chine, il n’y a pas de surprise là (rire), quoiqu’il y a eu plein de traditions qui ont été développées dans d’autres pays, au Japon, en Corée. Mais en fait, ça vient de la Chine et ça fait plusieurs millénaires que ça existe. Typiquement, dans la médecine chinoise, il y a l’acupuncture qui est la plus connue. Mais il y a aussi la pratique de l’herboristerie, donc l’utilisation des plantes et d’autres substances pour donner aux gens, ce qui est devenu la pharmacie moderne, la pharmacologie moderne. Ensuite de ça, il y a la diététique, l’alimentation qui va servir à la santé. Après ça, il y a le massage. Le massage chinois, qui s’appelle le tu i na qui est un massage thérapeutique, pour traiter des conditions spécifiques et ça peut vraiment faire le même travail qu’un acupuncteur pourrait faire. Un bon praticien en tu i na va pouvoir accomplir des résultats aussi similaires. Même chose pour l’herboristerie, même chose pour toutes les branches de la médecine chinoise en fait. Souvent, il y a des écoles où est-ce qu’on va enseigner toutes les branches au complet et il y a certaines écoles justement, comme au Québec, où est-ce qu’on enseigne seulement l’acupuncture pour différentes raisons. Il y a différentes branches, puis moi je pratique et au Québec on pratique surtout l’acupuncture. Donc, la médecine chinoise, qui est la base de tout ça, c’est une médecine qui est basée sur une philosophie qui est différente, sur des valeurs qui sont différentes, sur une façon de voir le monde qui est complètement différente. C’est ça qui est vraiment particulier, c’est une façon d’approcher l’humain et aussi la nature et de les mettre en lien ensemble. Par exemple, on va vraiment faire des liens entre les symptômes et le climat. On va dire, s’il y a tel symptôme qui apparaît dans telle saison, il y a quelque chose à comprendre de ça. Ou tel symptôme est aggravé par le froid, par la chaleur, par l’humidité, par le vent. Donc on va vraiment mettre une attention particulière là-dessus. Une autre chose qu’on va regarder, c’est le facteur émotionnel. Typiquement, on va dire, chaque organe, en médecine chinoise, a des fonctions physiques, des fonctions physiologiques et aussi des fonctions émotionnelles. Donc, chaque organe va avoir une émotion qui va sortir quand il est en déséquilibre. Puis aussi, une émotion va affecter typiquement un organe spécifique. Donc, quelqu’un qui a beaucoup de soucis, qui pense beaucoup, que ça tourne beaucoup et qui reste là-dedans, bien typiquement, ça va affecter ce qu’on appelle la rate pancréase, donc l’aspect digestif. Typiquement on va dire, quelqu’un qui a un problème digestif, ah est-ce qu’il a beaucoup de soucis, par hasard? Puis la personne va dire, il y a de bonnes chances qu’elle dise oui, il y a de bonnes chances que plusieurs d’entre nous disent oui là, mais typiquement ça va être caractéristique d’un portrait qui implique autant un aspect psychique, émotionnel qu’un aspect physique. Puis souvent, en traitant, donc on va traiter en fait le corps, on va mettre des aiguilles à des endroits spécifiques, bien on va voir souvent qu,autant les symptômes physiques vont s’améliorer que l’aspect psychique. La personne va dire, ok je digère mieux, je peux manger beaucoup plus ce que j’aime et en même temps, c’est vrai aussi que je dors mieux parce que je pense mois, je pense moins la nuit, je suis moins pris dans mes soucis.
Aimy :
Il y a vraiment comme une notion de la santé qui est plus globale.
Christian :
Exactement.
Aimy :
Que de séparer le physique du mental ou de l’émotionnel?
Christian :
Oui, complètement. Et pour quelqu’un qui est intéressé, c’est vraiment ça qui est à exploiter dans cette médecine-là, c’est l’aspect vraiment global, holistique, peu importe le mot qu’on utilise, c’est pour dire qu’on fait des liens entre les choses. C’est vraiment une médecine de lien, en apparence où il n’y en aurait pas. La surprise est souvent là, en fait. Donc, nous, par différents moyens, des grilles d’analyse, il y a tout un aspect intellectuel. On apprend ces connaissances-là, on fait des grilles, on apprend à mettre les symptômes ensemble ou à les mettre dans des endroits différents. Ça, c’est l’aspect analytique. Il y a aussi un aspect, je dirais, intuitif, sensoriel, sensitif, qui est très important et qui fait partie vraiment de la démarche du praticien en acupuncture. Le praticien en acupuncture ou l’acupuncteur, doit avoir une démarche personnelle aussi et doit avoir une certaine capacité à percevoir les choses pour pouvoir bien traiter par la suite. Typiquement, on va attribuer une grande importance aux pratiques personnelles, souvent les pratiques comme le chi gong, le tai chi. Donc, l’acupuncteur va typiquement faire ses pratiques-là pour affiner sa capacité à ressentir les choses et ensuite, il va utiliser ça pour le traitement. Ça, c’est quelque chose qui est vraiment intéressant.
Aimy :
C’est comme un peu encouragé, d’aller travailler ce développement personnel, en parallèle de ce développement professionnel?
Christian :
C’est exactement ça.
Aimy :
Parce qu’ils sont complémentaires?
Christian :
Parce qu’ils sont complémentaires et carrément indissociables. Les prémisses, quand on regarde dans les vieux textes, les textes anciens, on va dire que le médecin, ils appelaient ça médecin, mais on est pas médecin, on est acupuncteur, mais dans le temps, le médecin de grande qualité est quelqu’un qui perçoit bien les choses, qui voit bien les choses, qui est capable de bien sentir les choses.
Aimy :
Et pour affûter cette perception là, c’est là qu’on va chercher des outils comme le tai chi, le chi gong et les choses personnelles?
Christian :
Exactement. Il y a une grande importance qui est attribuée à ça. Un autre exemple qui est lié à ça, quand on apprend l’herboristerie, typiquement, le pharmacien ne va pas goûter à tous les médicaments pour savoir ce que ça va faire.
Aimy :
(rire) Idéalement.
Christian :
Ça serait bon, idéalement (rire). Bon c’est correct, chacun fait ses trucs, mais en médecine chinoise, on va vraiment dire admettons la plante, l’écorce du magnolia, c’est une plante qui est utilisée pour défaire telle ou telle stagnation dans le corps, pour travailler sur tel organe, il faut la connaître de l’intérieur. Alors on va goûter à la plante nous-même pour sentir ce qu’elle fait et on va dire, je connais mieux la plante parce que je l’ai expérimentée. On la connaît intellectuellement parce qu’on l’étudie et après ça on la connaît…
Aimy :Physiologiquement.Christian :
Physiologiquement, exactement. La médecine chinoise, il y a vraiment ce rapport entre les deux.
Aimy :
Il y a une notion de contact, hein?
Christian :
Oui!
Aimy :
Quand tu me disais sensoriel, sensitif, le toucher, le goûter, donc nos sens sont utilisés dans la pratique? Christian :
Complètement.
Aimy :
Autant comme patient que comme praticien.
Christian :
Oui.
Aimy :
Tu me décris tout ça, c’est super intéressant, mais ça peut rester un peu abstrait pour quelqu’un qui n’a jamais consulté un acupuncteur. Si je te demandais de me concrétiser tout ça en me décrivant un mardi matin. Un mardi matin, tu arrives au bureau, tu enlèves ta veste, qu’est-ce qui se passe?
Christian :
Qu’est-ce qui se passe… Alors, je rentre dans le bureau. Ensuite, je prépare l’espace, préparer la salle. La salle, grosso modo, c’est un bureau de consultation pour qu’on puisse parler, discuter, échanger. Il y a aussi une table, une table à massage, on va s’installer sur la table et on va faire le traitement. Donc, on prépare les dossiers, on regarde, mettons que c’est un suivi, on regarde, la personne s’en vient, qu’est-ce que j’ai fait la dernière fois, qu’est-ce que je vais faire aujourd’hui, on va voir, selon la réaction de la personne. La personne vient et elle raconte son histoire, ok depuis qu’on s’est vus, il y a eu telles, telles choses qui ont changé, telles choses qui sont similaires. Après, on se met à penser, qu’est-ce que je pourrais faire et après on va aller faire l’évaluation à nouveau pour voir où on en est rendu, puis on va faire le traitement. Typiquement, un traitement d’acupuncture, souvent c’est un suivi. La personne doit venir, on ouvre des portes.On regarde qu’est-ce que la personne à de besoin et souvent on va toucher à ce que la personne ne sait pas qu’elle a besoin et on va l’amener à découvrir ça tranquillement. Concrètement, la personne va venir, on va faire l’évaluation, après on va mettre des points, on va faire une prescription de points. On va trouver une recette qui irait le mieux à la personne selon ce qu’on évalue puis on met les points sur des points spécifiques.
Aimy :
Donc, des aiguilles?
Christian :
Des aiguilles, exactement. Je dis point aux gens en tant que tel, on va mettre un point parce que des fois, le mot aiguille, ça peut être épeurant parfois.
Aimy :
Est-ce que ça arrive souvent, chez les patients, qu’ils soient un peu apeurés de se faire empaler par une aiguille?
Christian :
Oui, effectivement. Ça peut être impressionnant. Effectivement, ça arrive assez fréquemment en consultation que les gens n’ont jamais fait ça et toute la famille leur dit va te faire traiter alors ils viennent à la séance…
Aimy :
Mais un peu à reculons quant à l’aiguille elle-même?
Christian :
Exactement. Ils viennent pour les bénéfices premiers, mais l’aiguille en tant que tel ce n’est pas leur premier choix. Mais finalement, 99% du monde sortent d’ici avec le sourire. Il n’y a pas de stress, il n’y a pas de problème et c’est très petit, très fin. L’aiguille, c’est une aiguille sèche. C’est une aiguille qui est pleine, on injecte rien. C’est une aiguille qui est tellement fine qu’on peut faire un nœud dedans. C’est vraiment très, très fin. Après, on met ça dans les points en question et les gens vont avoir souvent une expérience de grande relaxation. Souvent, les gens vont vivre une espèce d’état altéré, ah je me détends, ça fait longtemps que je n’ai pas fait une sieste qui avait cette qualité là. Il y a vraiment un espace de régénération. Ça devient un espèce de beau rituel, en fait. On met les aiguilles, après ça on s’en va, je laisse la personne, je dis, mijoter pendant (rire), j’ai développé mon vocabulaire au cours des années, on laisse reposer pendant 25-30 minutes et pendant ce temps-là, la personne vit l’expérience. Souvent, c’est une expérience qui va vers la relaxation, la détente, voire le sommeil. Il y a des gens qui sont sensibles, qui vont sentir, dire ah oui j’ai senti tel courant qui passait, qui travaille ma jambe, puis j’ai senti mon ventre qui faisait glou-glou puis mon mal de tête est parti pendant la séance, plein d’autres affaires.
Aimy :
Fait que tu vas faire la prescription en termes de points comme tu disais, tu vas installer les aiguilles, tu quittes, tu laisses la personne vivre ce moment là, se détendre, ensuite tu reviens, tu retires les aiguilles?
Christian :
Idéalement, oui (rire).
Aimy :
Idéalement, idéalement, pour ne pas que les gens partent en porc-épic (rire).
Christian :
C’est ça.
Aimy :
Donc, tu retires les aiguilles, puis discussion? Pour voir comment ça a été?
Christian :
On fait un debriefing. Comment ça s’est passé, est-ce qu’il y a des choses notables. Après ça, on va donner un peu une proposition. C’est des propositions à faire pour la maison, écoute tu peux t’attendre dans les prochains 24-48 heures qu’il y ait des effets qui se passent. Prends note et on s’en reparle la prochaine fois. On peut donner des conseils alimentaires, des choses, des conseils propres à notre pratique. Après ça, la personne quitte puis reviens, souvent la fréquence c’est une fois par semaine, pour quelques temps qu’on voit la personne, pour avoir un suivi, avoir un momentum. C’est simple comme ça.
Aimy :
Là, tu parlais des points que tu vas cibler dans ta prescription. J’imagine que c’est la base de tout votre médecine, mais comment tu les trouves, les points? C’est quoi les points, en fait?
Christian :
C’est quoi ces points-là? (rire) Ce qui est intéressant, c’est que ces points-là, d’un point de vue physique, on ne les voit pas. Ça veut dire qu’il n’y a pas, admettons les muscles, la peau, les organes, ça on fait un cours d’anatomie puis on sait où est-ce que c’est, on sait ce que c’est, on sait à quoi ça ressemble puis tout ça. La médecine chinoise, c’est une médecine qui se dit une médecine énergétique. Le mot énergie, c’est un mot qu’il faut définir puis en même temps, qui est difficile à définir. Typiquement, la pratique de l’acupuncture ou de la médecine chinoise c’est la capacité à intervenir pour que l’énergie puisse circuler là où c’est bloqué. Qu’il y ait un blocage, typiquement une douleur, un symptôme, quelqu’un qui a mal au coude, qui a mal à la tête, on va dire, d’un point de vue occidental, on va dire qu’il y a des tensions musculaires dans les trapèzes, par exemple, dans les sterno-cléido-mastoïdiens puis ça fait des irradiations à cause de telle ou telle chose comme ça. Ok, ça c’est d’un point de vue physique, anatomique puis c’est une perspective qui est véridique et intéressante. Mais là, on va mettre une autre lunette. La lunette de l’acupuncteur, c’est de dire là, il y a des maux de tête. C’est où? C’est où, ça veut dire de trouver un trajet parce qu’on travaille avec ce qu’on appelle des méridiens. Donc, les points d’acupuncture sont sur des méridiens. Ils sont sur des autoroutes par lesquelles l’énergie passent et les points, c’est comme des lumières. Des fois, la lumière est verte et des fois, la lumière est rouge. Souvent, ça circule ou ça ne circule pas. Souvent, on va vouloir soit augmenter le flux, c’est-à-dire débloquer là où c’était bloqué. Il y a du trafic et on veut mettre la lumière verte pour que ça puisse circuler ou des fois le point est en vite, il faut apporter de l’énergie à cet endroit-là. Mettons, si tu as une atonie musculaire, si tu as une douleur et que ta musculature est rendue molle puis faible, là, ce n’est pas le temps de faire circuler, c’est le temps d’amener du chi, d’amener de l’énergie. Chi, c’est le mot chinois pour dire énergie. Donc, d’amener l’énergie à cet endroit-là. On va faire des traitements qui vont viser à amener de l’énergie. D’un autre côté, si tu as des maux de tête, souvent, si tu as mal à la tête, c’est que tu as trop d’énergie en haut. C’est assez simple, c’est un langage assez simple en fait. Ça monte trop, il faut faire descendre le chi, descendre l’énergie. Ce qu’on peut faire, on va mettre des points au niveau des pieds, pour dire au corps comme ok là, tu en mets trop en haut, distribue un peu, fais descendre l’énergie. Puis, typiquement, les gens vont ressentir à même la table l’effet. Puis les points, c’est des points très précis. Il y a toute une étude systématique pour savoir où sont les points, les trajets. Puis souvent, avec la pratique, on réalise que le point, c’est un endroit qu’on connaît théoriquement mais que pour vraiment trouver le point, il faut le sentir. D’où l’histoire de faire une pratique intérieure avec le chi gong et le tai chi parce que le point en tant que tel, c’est un point qui a une existence sensorielle, sensitive et il a aussi une existence théorique. On peut dire ce point, il a telle distance, ce point est là, il a tel nom puis il a telle fonction connue. Ça fait 2000 ans qu’on note que par ce point-là, ça a tel, tel puis tel effet. Après ça, on va dire, on peut vraiment arriver à sentir tel point. Tu parlais de contact tantôt. On contacte le point, on connecte avec et dès qu’on… C’est un peu comme, tu as un problème et tu vas en parler. Je suis là et je t’écoute, ça amène une guérison, ça amène quelque chose à bouger. Donc, juste le fait d’être en contact avec le point, ça amène à vouloir s’exprimer et à vouloir se mettre en circulation. C’est une médecine qui est, qui a comme une intimité à développer avec le corps de la personne et avec ces points-là spécifiques, c’est comme des points de contact. Je pense que j’aime ce terme-là. On le définit ensemble. Les points d’acupunctures, c’est des points de contact entre la personne et l’extérieur.
Aimy :
Ces méridiens-là, aller accentuer ou aller réduire le flow qu’on pourrait retrouver d’énergie.
Christian :
Exactement.
Aimy :
Super intéressant. Qu’est-ce que tu dirais qui sont les raisons pour lesquelles les gens te consultent actuellement?
Christian :
Les gens vont consulter pour des problèmes vécus, pour des problèmes chroniques, par curiosité, par prévention. Il veulent leur tune-up saisonnier, par exemple. C’est intéressant, parce qu’on peut aider justement, parce qu’on a toute une compréhension de comment le corps est relié avec l’environnement. On peut travailler pour aider, mettons, il y a un gros hiver et là on est rendus le 15 mai et tu dis ah c’est drôle, je me sens encore comme si, on dirais que je ne décolle pas. Je me sens encore pris, j’ai encore envie de manger de la soupe chaude toute la journée puis après, on va comprendre que la personne n’est pas harmonisée avec le printemps encore. Fait que là, on va travailler des organes qui sont en lien avec le printemps. Il y a comme ce dialogue-là, ce discours-là. Ça, c’est l’une des raisons de consultation, mais sinon les gens vont venir pour des problèmes… Il y a beaucoup de femmes qui viennent me consulter pour des problèmes gynécologiques, reliés au cycle menstruel. Après ça, l’aspect de fertilité, l’obstétrique, des suivis de grossesse, ça fait partie de nos consultations. Il y a beaucoup les problèmes pulmonaires, l’asthme, bronchite, attraper des rhumes fréquemment, toux, etc. Problèmes digestifs, beaucoup de problèmes digestifs. Douleurs, évidemment. Douleurs de dos, douleurs de coude, douleurs de genoux. Après ça, l’aspect plus psychologique, des gens qui viennent pour stress, anxiété. Dans le fond, on est pas mal des généralistes, on traite beaucoup de conditions en fait.
Aimy :
C’est très, très varié.
Christian :
C’est ça qui est vraiment spécial, c’est que, tu me disais tantôt, à quoi ressemble ta journée? Quelqu’un va venir et va dire, mettons, j’ai mal au genou. On traite le genoux. Ensuite, l’autre personne va dire, je suis en transition de carrière. Ok, transition de carrière, ohhh! Transition de carrière et je vis vraiment beaucoup de stress à l’intérieur relié à ça et je n’arrive pas à avoir de clarté par rapport à ce qui s’en vient. Je vais dire ok, je connais une conseillère extraordinaire à côté, mais sinon on peut aussi encourager l’énergie du foie, par exemple, qui est un organe qui va être lien avec la mise en mouvement. S’il y a quelque chose qui est pris au niveau des idées, au niveau du corps, on peut travailler ça et ça peut aider à mettre en mouvement. C’est subtil, c’est un autre niveau et il y a comme un angle psycho-émotionnel. Une autre personne va venir et va dire, j’ai un cycle irrégulier, cycle menstruel irrégulier, avec des douleurs importantes et j’ai des SPM puis je ne me tolère plus et mon chum ne me tolère plus. Donc, là on va traiter, souvent c’est très efficace d’ailleurs pour ça. C’est très varié.
Aimy :
Fait que ta journée va varier selon ce qu’on te demande?
Christian :
Complètement. Puis aussi, chaque personne, c’est parce qu’on ne fait pas, le but ce n’est pas de trouver un diagnostic, c’est le médecin qui fait ça. Le mot diagnostic, c’est propre à lui. Mais ce qu’on va faire, ce n’est pas d’essayer de caractériser tant que ça. Ce qu’on va essayer de trouver, c’est le syndrome, c’est-à-dire une façon de mettre les symptômes ensemble pour comprendre la personne, tout en comprenant que c’est une situation singulière et unique. C’est à double tranchant car d’un côté, ça ouvre tout un potentiel pour dire toi tu viens avec un mal de tête et quelqu’un d’autre vient avec un mal de tête et ça va être un traitement complètement différent, complètement différent. Puis l’autre personne, typiquement, chaque traitement est différent.
Aimy :
En fonction de l’individu, du moment où il vient te rencontrer puis tout ça.
Christian :
En fonction de l’individu, de son état, puis de la saison, beaucoup de paramètres sont impliqués.
Aimy :
Tous ces liens-là dont tu parles.
Christian :
Oui.
Aimy :
Est-ce que tu dirais qu’il y a des choses qui ne sont pas traitables par l’acupuncture?
Christian :
Oui. Il y a des conditions qui sont difficilement traitables en acupuncture. Il y a aussi toutes les conditions d’urgence. La médecine moderne est extraordinaire pour toutes les conditions d’urgence qui nécessitent des hospitalisations et certains médicaments. Je te dirais que traditionnellement, l’acupuncture était utilisée pour des situations d’urgence et des situations importantes, mais c’était ça la médecine qui existait. Quelqu’un avait des problèmes cardiaques et ils le traitaient, tous les départements de la médecine existent en médecine chinoise aussi. Mais là, on découvre que la médecine occidentale a une efficacité incroyable pour plein de conditions, on le sait, on va référer. Donc, ça c’est vraiment important de le faire. Il y a des conditions spécifiques, mais il y a aussi des conditions où l’on voit qu’on atteint des limites, des plateaux, pour plein de raisons et il faut respecter ça.
Aimy :
Fait que ça se pourrait de référer en psychologie, de référer en sexologie, de référer en travail social, d’aller chercher d’autres ressources?
Christian :
Complètement. C’est super important de savoir faire ça. Surtout de reconnaître que nous, on travaille, on intervient sur l’énergie qui est à cheval entre, qui est un travail sur le corps mais qui implique aussi la psyché. C’est un peu ça. En même temps, effectivement, on réfère selon les besoins spécifiques aussi.
Aimy :
Qu’est-ce que tu dirais qui est le plus grand défi que tu rencontres au quotidien?
Christian :
Le plus grand défi, c’est un peu ça.
Aimy :
De s’ajuster aux cas uniques à chaque fois?
Christian :
Exact. Puis d’arriver, des fois, souvent, il y a des gens qui viennent, tu vas voir l’acupuncteur, mais il y a plein d’autres choses. Les gens viennent avec des conditions vraiment particulières. Qui sont particuliers et qu’ils ont tout essayé et toi tu n’as jamais vu ça. J’ai les outils pour le comprendre, mais c’est un défi, c’est un défi effectivement.
Aimy :
Comme une notion, tu me corriges si je me trompe, mais il y a comme une notion d’humilité, un peu. Ça se peut que je ne sache pas, depuis le début, exactement ce qui se passe?
Christian :
Oui, exactement. Il y a beaucoup d’inconnu.
Aimy :
À aller découvrir au fil des rencontres avec la personne.
Christian :
Exactement, oui.
Aimy :
Donc, l’acupuncture, est-ce que tu sais vous êtes combien au Québec à pratiquer l’acupuncture?
Christian :
On est proche de 1000, à être dans l’Ordre.
Aimy :
Dans la population du Québec, on s’entend que c’est un métier qui est quand même relativement rare. Qu’est-ce qui fait que c’est celui que toi, tu as choisi?
Christian :
Je pense que… C’est drôle, parce qu’en cours de route, je découvre, avec les années, pourquoi je fais ce métier-là. Je te dirais, ça réfère, quand j’étais enfant, j’avais des intérêts pour le corps humain. J’avais un livre avec des planches anatomiques et ça m’intéressait. J’avais un intérêt pour l’astronomie. J’avais un intérêt pour l’archéologie, l’histoire. J’avais un intérêt pour la biologie. J’avais ces différents intérêts-là. C’est drôle, parce que je suis parti en acupuncture après un parcours en sciences sociales, en anthropologie et en psychologie. Dans le cadre d’un cours en anthropologie. j’ai fait un travail en anthropologie médicale et j’ai vu qu’il y avait d’autres métiers qui existaient, dans d’autres cultures puis ça m’a comme appelé. Puis en même temps, c’est une médecine d’ailleurs, fait qu’il y a comme un aspect d’anthropologie qui est là, d’ethnologie. C’est une médecine ancienne, donc il y a l’aspect historique qui est là. Il y a toute une histoire. Il y a aussi toute une étude des textes anciens qui est importante. Il y a aussi l’aspect technicité, donc toutes les aiguilles, c’est vraiment fin. Ça prend une bonne dextérité et j’ai un aspect manuel développé. J’aime beaucoup, j’ai un côté artistique et un côté travail manuel que j’aime beaucoup. Il y a un aspect d’analyse qui est présent. Donc, la capacité à analyser, la capacité à faire des liens et l’aspect sensitif aussi. Le fait que c’est relié à un développement personnel, ça m’a beaucoup appelé. Puis j’étais intéressé par l’Orient, par l’Asie. Ces pratiques-là, méditation, différentes choses. Ça m’a amené tranquillement à dire, j’ai envie de pratiquer cette médecine-là. J’ai envie de la pratiquer. Au début, j’avais envie de l’étudier dans un contexte d’anthropologie et après je me suis dit : j’ai vraiment envie d’être quelqu’un qui connaît cette médecine là.
Aimy :
Un praticien.
Christian :
Un praticien, oui.
Aimy :
Donc, tu n’avais jamais consulté toi-même en acupuncture?
Christian :
Je n’avais pas consulté avant de rentrer ici, c’est un peu une autre histoire. J’ai été me faire traiter quand j’ai été accepté en acupuncture. J’ai eu un traitement, ok oui, c’est correct. Je n’ai pas été impressionné tant que ça. J’étais un peu embêté parce que j’étais accepté, je suis entré et plus tard, j’ai réalisé, parce qu’évidemment j’ai fait mon programme. J’ai réalisé, encore là, les aiguilles, c’est l’un des aspects, mais c’est l’histoire, c’est la philosophie, c’est plein de choses. Puis en cours de route, l’acupuncture m’a sauvé la vie, à plusieurs reprises. Vraiment, après ça, j’en ai bénéficié énormément, mais ça n’a pas été… Il y en a qui racontent cette histoire-là et qui disent, j’avais des problèmes chroniques, j’avais une maladie, je me suis fait traiter, ça a marché et je me suis comme converti puis j’ai été pratiquer ça. Moi, ce n’est pas ça.
Aimy :
C’était comme une grande curiosité?
Christian :
Oui.
Aimy :
Cet amalgame de savoir et de pratique, c’était attirant pour toi?
Christian :
Oui, effectivement. C’était attirant.
Aimy :
Assez pour que tu ailles t’inscrire dans le programme?
Christian :
Oui, complètement.
Aimy :
À l’opposé, donc tu as choisi ce métier-là, quel autre métier tu n’aurais jamais, jamais voulu faire?
Christian :
Comptable!
Aimy :
Comptable? Me dit-il avec assurance!
Christian :
Oui, comptable.
Aimy :
Pourquoi comptable?
Christian :
Tu parlais du défi tantôt de la pratique. On est travailleur autonome, il y a tout l’aspect de…
Aimy :
Est-ce que tous les acupuncteurs sont travailleurs autonomes?
Christian :
Oui, comment dire…
Aimy :
La majorité?
Christian :
La majorité. Parce que tu peux aussi être engagé dans des cliniques comme employé, mais c’est plus rare. Puis honnêtement, c’est vraiment plus un travail sous l’égide du travailleur autonome. La plupart des acupuncteurs ont leur propre clinique, en tout cas, beaucoup ont leur propre clinique. Beaucoup aussi vont travailler en clinique multidisciplinaire, donc avec d’autres acupuncteurs, des ostéo, des physio, des chiro, tout ça. Puis comme travailleur autonome, il faut que tu fasse ta comptabilité, que tu gères cet aspect-là. Depuis le début, je savais que ça allait me rebuter parce que je ne l’ai pas. Pas je ne l’ai pas, mais je l’ai développé. Je l’ai développé et finalement quand tu t’y mets, tu aimes ça. Il faut juste y aller. Je dirais, l’aspect des chiffres…
Aimy :
Ce que j’entends, c’est que dans ton quotidien, cette partie-là, je vais faire mes comptes je vais regarder mes factures, je vais faire un peu ma paperasse, c’est peut-être la partie de ta job que tu aimes moins?
Christian :
Oui, effectivement. C’est un aspect que j’aime moins, un peu.
Aimy :
être avec tes patients, c’est plus agréable?
Christian :
Oui! Exactement.
Aimy :
À l’opposé, si tu pouvais faire un autre métier, si tu avais toutes les capacités, toutes les compétences, si tout était possible, qu’est-ce que tu ferais d’autre comme métier?
Christian :
Je pense que ça réfère un peu à ce que je disais tout à l’heure, à ce qui m’a amené là. Je pense que j’aurais pu être anthropologue, historien, ça m’intéresse.
Aimy :
La connaissance, le savoir?
Christian :
Le savoir, la connaissance. J’aurais pu être… Je voulais être, un jour, un biologiste parce que ça appelle justement… Là, j’apprends l’herboristerie puis je développe ma connaissance de la botanique puis tout ça. Vraiment, je trippe beaucoup, c’est vraiment super. Je pense que la biologie, ça aurait été un potentiel. Peut-être même dans le travail manuel, peut-être même, justement travailler des matières, ébéniste, j’ai toujours beaucoup aimé travailler le bois. Dans le fond, c’est comme des variations sur un même thème un peu.
Aimy :
Si on décortiquait ta thématique actuelle, tous ces petits angles-là pourraient devenir indépendamment intéressants pour toi?
Christian :
Oui. Exactement.
Aimy :
Donc, là tu nous parles depuis tout à l’heure de la médecine chinoise, des écrits ancestraux. On sait que une pratique qui date de milliers d’années. Malgré tout ça, la science avance beaucoup, la technologie avance beaucoup, comment est-ce que tu penses que acupuncture va évoluer dans les 10, 15, 20 prochaines années?
Christian :
Typiquement, as-tu lu le livre Brave New World?
Aimy :
Il y a longtemps, oui.
Christian :
(rire) À l’adolescence, tout le monde a lu ce livre là!
Aimy :
Comme tout le monde (rire).
Christian :
Oui, comme tout le monde. Puis typiquement, il y a l’avancée technologique puis il y a un courant réactionnaire, il y a quelqu’un qui est comme le sauvage, pas exactement, mais à un moment donné, il y a comme l’appel de la nature. Là, on est à cheval entre justement évoluer au niveau technologique et évoluer dans la conscience et dans les valeurs. Ça amène inévitablement à respecter davantage les ressources qui sont là. Aussi, le rapport à la technologie, c’est comme si on a tous ce rapport-là, la plupart du monde, où est-ce qu’on est en lien avec des écrans et on réalise qu’il faut se limiter, faire attention. Ça a tout un côté positif, mais en même temps ça a un impact. Ça, c’est le monde dans lequel on vit et l’acupuncture c’est comme la médecine chinoise, c’est comme une médecine traditionnelle qui est sur la terre depuis des milliers d’années, depuis vraiment longtemps et c’est comme : pourquoi est-ce que là, dans l’humanité, il y aurait un tel changement qu’on aurait plus appel à ça? On dirait que ça touche à une fibre de l’humain qu’on reconnaît parce que ça fait tellement longtemps qu’on utilise ce genre de médecine naturelle.
Aimy :
Il y a quelque chose d’intemporel.
Christian :
C’est quelque chose d’intemporel puis effectivement, les problèmes changent, le type de problème change, tout se complexifie. Puis en même temps, c’est intéressant parce que maintenant on peut étudier les choses comme la médecine chinoise et la méditation d’un point de vue scientifique et on peut trouver des éléments pour mieux comprendre d’un point de vue scientifique. Mais encore là, du point de vue de l’expérience, c’est quelque chose, je pense, de difficilement remplaçable. C’est un soin qui est autonome. Mettons, tu te fais mettre des aiguilles et ça traite des affaires, ça traite des conditions. Je pense que l’aspect magique, qui touche à quelque chose d’important. Je pense que c’est important, la magie. C’est de la petite magie, comme médecine. Ce l’est.
Aimy :
Fait que ta vision pour le futur, en fait, c’est cette espèce de retour aux sources? C’est de se dire, moi, la techno va avancer, il n’y a pas de problème, mais mes poumons ils restent où est-ce qu’ils sont et ceux de mes enfants risquent d’être à la même place. Les problématiques vécues pourraient être différentes, mais le soin, le traitement, lui, risque d’être maintenu et peut-être demander encore plus, si c’est ça que u me dis?
Christian :
Exact. Je pense que ça aura sa place encore longtemps. Aussi, c’est simple. C’est très simple. C’est ça qui est beau là-dedans. On ne sait pas ce qu’il va arriver dans 100 ans, s’il y a des choses qui tombent et des choses qui ne fonctionnent plus, la nature est là avec ses ressources puis il faut juste savoir l’utiliser. C’est un statement, à quelque part, en fait, de pratiquer cette médecine-là.
Aimy :
C’est un statement?
Christian :
Effectivement, tout à fait.
Aimy :
Il y a quelque chose hors norme?
Christian :
Oui, quelque chose hors norme pour le temps actuel.
Aimy :
Mais quand tu dis que c’est un statement, c’est d’être capable de porter ce chapeau-là?
Christian :
Oui, effectivement. Puis oui, c’est important ce que tu dis parce que c’est vrai que c’est hors norme. C’est un langage qui est différent aussi. Même avec les autres thérapeutes, c’est de la médecine chinoise, c’est chinois, c’est d’autres mots, c’est une autre façon de voir le monde. Puis souvent, il faut s’adapter à la vision contemporaine. Des fois, il y a des synergies, des fois ça clique et des fois c’est différent, c’est des principes opposés. C’est de savoir reconnaître qu’est-ce qui est la bonne chose, qu’on peut dire que ça fait 3000 ans que ça existe, donc ça doit être une vérité sur l’humain puis de dire là, on change et on évolue. Peut-être que, justement, il y a des vérités qui sont différentes. C’est toujours ça, un peu. Par exemple, par rapport à la fertilité, ça a beaucoup changé. Il y a tout un traitement pour accompagner la fertilité. Mais là, je veux dire, éthiquement, il y a des choses qui changent. On peut faire du travail in vitro pour la fertilité. Ça change les paramètres naturels qui disent : tout doit être selon l’équilibre naturel du corps. Il y a une évolution éthique qui se fait.
Aimy :
Il y a un ajustement qui se fait aussi.
Christian :
Oui, puis ce qui est intéressant, c’est que par rapport à la fertilité, on peut aider le processus par des méthodes traditionnelles. Aider le processus moderne à mieux fonctionner. C’est intéressant. Ça date, mais même la médecine chinoise, ce n’est pas une médecine fixe. C’est pas parce que ça a été écrit il y a 2000 ans que c’est la même chose. C’est constamment en évolution puis c’est ça qui fait que ça va rester, d’après moi, c’est que ça évolue constamment.
Aimy :
Toute cette notion accompagnement dont tu me parlais, par exemple des gens, des acupuncteurs qui vont travailler en clinique multidisciplinaire, ça va se poursuivre avec les avancées de tout le monde autour. Vous allez être là encore en accompagnement et en adaptation quant à tout ce qui s’en vient. Qu’est-ce que tu en penses?
Christian :
Je pense que oui, puis je le souhaite. Je pense que c’est important.
Aimy :
Dans toute cette vision du futur, si on pense à la relève, si on pense à quelqu’un qui se pose des questions, qui se dit, peut-être que je voudrais être acupuncteur, qu’est-ce que tu donnerais comme conseil à quelqu’un qui voudrait œuvrer dans ce domaine-là plus tard?
Christian :
Écoute, je pense que c’est le même conseil que n’importe qui donnerait dans son métier, dans le sens où est-ce qu’il faut que tu sois passionné, que ça t’appelle, que tu aies la curiosité pour ça. C’est la base. Je pense que ça prend cet intérêt-là de base et pour la suite, je pense qu’on a besoin d’avoir, on est environ 1000 au Québec et ça a vraiment sa place, cette médecine-là. Sa place est importante puis ça apporte beaucoup de bénéfices, les gens retirent énormément de ça. Les gens en bénéficient énormément au niveau de leur santé, de cette médecine-là. C’est pour ça que ça marche et c’est pour ça qu’ils reviennent. Oui, c’est ça, je dirais de suivre ça. Si tu as un intérêt, juste de le poursuivre, de l’explorer, c’est vraiment un bel univers.