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MINEUR DE BITCOIN

AVEC JONATHAN BERTRAND

Février 2019 | Musique et montage par Alex Andraos

Nous rencontrons Jonathan Bertrand, mineur de Bitcoin, pour en apprendre un peu plus sur le concept des cryptomonnaies, le fonctionnement de son industrie, ainsi que sur son quotidien professionnel. Malgré le moratoire d’Hydro-Québec sur les demandes d'approvisionnement en électricité du secteur des cryptomonnaies, cette industrie est toujours bien vivante au Québec. Écoutez cette discussion éclairante avec l’un de ses leaders.

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MINEUR DE BITCOIN

AVEC JONATHAN BERTRAND

Aimy :

Bonjour et bienvenue aux Portraits professionnels, le balado où l’on tente de clarifier différentes professions du marché du travail. Aujourd’hui, on rencontre Jonathan Bertrand, mineur de bitcoin. On discute avec lui du monde méconnu des cryptomonnaies et des travailleurs qui y œuvrent. Jonathan Bertrand, bonjour.

Jonathan :

Bonjour.

Aimy :

Tu vas bien?

Jonathan :

Très bien et toi?

Aimy :

Ça va très bien, merci. Alors, merci de participer à l’entrevue aujourd’hui. On te rencontre parce que tu as un métier particulier, relativement rare. On peut dire ça, hein?

Jonathan :

Toujours assez rare, au Québec.

Aimy :

Toujours assez rare, au Québec. Comment est-ce que tu te présentes professionnellement?

Jonathan :

Naturellement, je me présente comme un mineur de bitcoin. Donc, Technologies D-Central, on a pris naissance en 2016, à ce moment-là, pour répondre justement à un besoin de décentraliser le protocole de bitcoin. Cette décentralisation est obtenue à travers un processus qu’on appelle le minage. Ce minage-là, fondamentalement, ça se retrouve à être tout simplement de faire des calculs qui servent à sécuriser le blockchain de bitcoin. Le blockchain, ultimement… est-ce que je vais un peu trop vite?

Aimy :

Je t’arrête. Je vais t’arrêter, puis on va clarifier. Donc, j’imagine que tu le sais, quand tu dis aux gens, je suis un mineur de bitcoin, les gens ils font : tu es un quoi? C’est ça qui se passe un peu?

Jonathan :

Oui. À 100%.

Aimy :

À 100%. Fait qu’on va essayer de clarifier un peu. Donc, tu m’as parlé de D-Central. D-Central, c’est ton entreprise à toi?

Jonathan :

Tout à fait.

Aimy :

Donc, tu es président de D-Central et puis tu me dis qu’à la base, lorsque vous avez fondé votre compagnie, c’était pour décentraliser le bitcoin?

Jonathan :

Exact.

Aimy :

Avant de rentrer dans qu’est-ce qui fait que le bitcoin avait besoin d’être décentralisé selon vous, on va commencer par clarifier. Donc, le bitcoin, c’est une cryptomonnaie?

Jonathan :

Tout à fait.

Aimy :

Qu’est-ce qu’une cryptomonnaie?

Jonathan :

D’abord, j’aimerais clarifier qu’il y a beaucoup de méconception, justement, en ce qui regarde les blockchains, les cryptomonnaies…

Aimy :

Je t’ai demandé de clarifier tous ces termes-là, by the way (rire).

Jonathan :

Oui, oui. Donc, blockchain, dans le fond, si on veut le traduire, ça serait la chaîne de blocs. Puis c’est vraiment ce que c’est. C’est un format de données qui est en blocs et ces blocs-là sont ajoutés, dans le fond, l’un à la suite de l’autre, dans le but de sécuriser tous les blocs précédents. Donc, le dernier bloc qui est ajouté doit contenir une certaine réponse mathématique, qui va venir, justement, puis qui va être obtenue en réussissant à faire le calcul qui, dans le fond, est applicable à tout l’historique de la chaîne. C’est un peu compliqué à banaliser. Mais ultimement, tout cet historique-là est sécurisé par les mathématiques qui ont été faits par tous les mineurs, partout dans le monde.

Aimy :

Donc, le blockchain, ça se peut que je l’explique très mal, tu vas pouvoir me corriger. Mais, le blockchain sert à sécuriser la monnaie?

Jonathan :

Le blockchain est vraiment le format de données, si on veut. Chacun des blocs sont ajoutés à la suite de l’autre. La sécurité, dans le fond, se trouve à être la méthode dans laquelle on écrit ces données-là, qui se trouvent à être en chaînes de blocs. Comme on attache chacun des nouveaux blocs à tout l’historique précédent, pour être capable d’attacher ce bloc-là, on doit faire ce qu’on appelle un proof of work. Ce proof of work se trouve à être l’équation mathématique que les mineurs font à travers le monde.

Aimy :

Ok, fais-moi le lien entre blockchain et bitcoin, par exemple.

Jonathan :

Donc, bitcoin, quand on fait une transaction de bitcoin, cette transaction-là, nécessairement, doit s’inscrire quelque part. Elle va s’inscrire dans le prochain bloc qui va être ajouté à la chaîne.

Aimy :

Donc, le blockchain, c’est un peu l’historique de tout ce qui va se passer en termes de transactions de cryptomonnaie?

Jonathan :

Tout à fait.

Aimy :

Ok. Fait que si je voulais m’acheter quelque chose avec des bitcoins, qu’est-ce que je pourrais m’acheter?

Jonathan :

Ce qu’un marchand va accepter, dans le fond. Donc, il y a plusieurs marchands. On sait qu’il y a eu, par exemple, Steam pendant un certain moment. Présentement, ils ne l’acceptent plus, je crois. C’est sûr que c’est une gestion vraiment compliquée, le bitcoin et les blockchains, en général. Donc, on sait qu’en ce moment, par exemple, Wall Street, avec BACT, le NYSC, des grosses institutions comme ça, sont en train de mettre en place des solutions de custody hold. Je n’ai pas le terme français, présentement, mais l’idée c’est d’agir en tant qu’intermédiaire qui va détenir les bitcoins, un petit peu comme dans une voûte. Mais, cette fois-ci, ce serait une voûte digitale plutôt qu’une voûte pour les lingots d’or, par exemple. Puis justement, comme je mentionne les lingots d’or et qu’on voulait parler aussi des cryptomonnaies, bitcoin est souvent mis dans la catégorie d’une cryptomonnaie et plein d’autres blockchains. Mais je pense que l’analogie, puis c’est difficile de faire une analogie qui est bonne avec toutes ces technologies-là parce que c’est quelque chose qui n’existe pas.

Aimy :

C’est complètement nouveau.

Jonathan :

Exactement. Mais si on veut faire une association, je pense que l’or est une meilleure association que l’argent en tant que tel, la monnaie. La raison, pour ça, c’est que bitcoin, tu veux vraiment être une réserve de valeur. Donc, ultimement, il peut y avoir d’autres institutions, d’autres layers, parce que bitcoin est aussi un protocole et comme tout protocole, il existe plus qu’une couche à un protocole. Puis les couches subséquentes au core layer sur lequel on travaille présentement pourraient très bien devenir des espèces de produits dérivés qui seraient monétaires et qui, justement, seraient des billets de banque avec lesquels on est familiers. C’est un concept qui est vraiment difficile à comprendre, mais le noyau de bitcoin sur lequel on travaille présentement se veut vraiment plus être une similitude à l’or qu’à la monnaie traditionnelle.

Aimy :

Qu’à l’argent.

Jonathan :

Oui.

Aimy :

Donc, si je réessaie encore, pour monsieur, madame Tout-le-Monde qui n’a jamais vraiment plongé dans le concept. Je reviens avec mon exemple : je veux m’acheter quelque chose avec des bitcoins. Mettons que moi, j’ai une bourse de bitcoin. Dedans, une bourse comme un portefeuille, un porte-monnaie. Dedans, j’ai des bitcoins que je me suis procurés d’une manière X et j’en ai 10. J’ai 10 bitcoins et je veux m’acheter, mettons, un service sur internet. Donne-moi un exemple, non peu importe qui l’accepte ou pas, mais qu’est-ce que j’aurais pu acheter, par exemple, avec des bitcoins?

Jonathan :

Bien, facilement, en fait, il existe même des tiers qui vont permettre d’envoyer des paiements. Comme, par exemple, ici au Québec, on a Bills qui permet d’envoyer des paiements à Hydro Québec. Donc, moi j’ai déjà payé des factures d’hydroélectricité avec des bitcoins.

Aimy :

Ok. Super. Mettons que c’est accessible, c’est possible, ça existe. Je reçois ma facture d’Hydro. Hydro me dit : Aimy, ce mois-ci, tu dois 8$. Huit dollars d’Hydro Québec, j’ai jamais entendu ça, mais mettons.

Jonathan :

Supposons.

Aimy :

Supposons. Je décide de prendre mes 8 bitcoins que j’ai, dans mes 10, et d’aller acheter mon électricité, donc payer ma facture. En termes de blockchain, ce que tu me dis, pour voir si j’ai bien compris, c’est qu’à quelque part, il va s’inscrire le fait que Aimy a donné 8 bitcoins à Hydro Québec et ça, ça se rajoute à la chaîne d’information, du mouvement des bitcoins.

Jonathan :

Tout à fait. Puis pour clarifier, tes 8 bitcoins, dans le fond, aujourd’hui, il ne faudrait pas loin d’une vingtaine de milliers de dollars. Donc, réellement, tu ferais une conversion, un petit peu comme quand on a du dollar US et du dollar canadien, on fait une conversion des cours. Donc là, dans ce cas-ci, ton 8$ canadien équivaudrait à 0,000000 quelque bitcoins. Mais, ce n’est pas grave, parce que les bitcoins sont divisibles et à ce moment-là, tu vas appliquer cette conversion des cours, envoyer ce zéro point X bitcoins-là et puis effectivement, cette transaction-là va s’inscrire dans le prochain bloc de bitcoin. Ce bloc-là, dans le fond, une fois qu’il va être résolu avec l’équation que les mineurs font, va être ajouté à la chaîne. Une fois qu’il est ajouté à la chaîne, ce bloc-là se distribue partout dans le monde et tout ce qu’on appelle un node, donc tous les nœuds participants, les ordinateurs. Puis, ce n’est pas juste les mineurs, tous les participants, donc même toi à la maison, tu pourrais avoir ton propre node.

Aimy :

Donc, même les acheteurs, les vendeurs…

Jonathan :

Les acheteurs, vendeurs, commerces, etc. vont revérifier que l’intégrité du bloc est bon et qu’il fit effectivement à tout l’historique de chaîne de bloc précédente. Le but de cela, c’est d’éviter ce qu’on appelle un double spend, par exemple. Donc, de dire en informatique, dans le monde digital, on le sait, si je t’envoie une photo, qu’est-ce qui te prévient de faire une copie de cette photo-là, puis ensuite de ça d’en envoyer une autre? Ce qu’on voit avec ça, c’est que dans le monde digital, il n’existe pas de rareté. Cette rareté-là, dans le fond, doit être enforced, justement, par le blockchain de bitcoin.

Aimy :

Donc, ça empêche la possibilité de dupliquer un bitcoin. Comme on ne veut pas que quelqu’un puisse prendre son billet de vingt et aller le copier sur la photocopieuse, c’est la façon aussi de prévenir ça.

Jonathan :

Exactement.

Aimy :

Bon, je reviens encore à ma sur-vulgarisation, on parlait avant de commencer l’entrevue, on parlait de la démocratisation du système économique.

Jonathan : Oui.Aimy :

Là, tu me dis, une fois qu’un bitcoin est créé, une fois qu’un bitcoin est dépensé, un bitcoin, mais en fait, ça pourrait être une fraction de bitcoin.

Jonathan :

Tout à fait.

Aimy :

Donc, une fois qu’il est créé, qu’il est dépensé, tout le monde, tout le monde dans la communauté bitcoin, si on peut l’appeler comme ça, pourrait avoir les yeux sur cette transaction-là puis aller vérifier qu’elle est valide, qu’elle est réelle, qu’elle n’est pas copiée.

Jonathan :

100%.

Aimy :

C’est un peu ça que tu me disais?

Jonathan :

Exactement.

Aimy :

Donc, ça m’amène à ma prochaine question, encore mon espèce de crash course bitcoin qu’on est en train de faire avant de commencer vraiment ton parcours à toi, qu’est-ce qui a créé le besoin, dans notre société, pour une monnaie comme le bitcoin?

Jonathan :

Je pense que, entre autres, c’est l’existence puis le fonctionnement des banques centrales. Je pense que c’est une très bonne chose et l’idée derrière ça se veut, je pense, que c’est quelque chose qui se veut bénévolent. Cependant, j’ai l’impression qu’en pratique il y a beaucoup d’effets pervers aux banques centrales et à la gestion centralisée. Il y a des agents, par exemple, qui vont être corrompus, comme on le voit au Nigeria et au Venezuela. Donc, pour ces populations-là qui, présentement, vivent des crises d’inflation absolument impossibles, bitcoin vient répondre à un besoin de protection des fonds, de valeurs refuge. Pour ces nations-là, je pense que c’est une question de vie ou de mort. Pour des places comme le Canada, où on a quand même une gestion plus saine des finances, ça vient quand même agir en tant que protection. Un peu comme une assurance, si on veut, sur si les choses se passent mal, bitcoin offre cette protection-là. Même s’il y a un désaccord avec certaines politiques. Par exemple, présentement, nous on a une certaine gouvernance. Mais rien ne nous dit que dans 4 ans, ça va être la même gouvernance qui va être appliquée. Si on veut s’acheter une certaine assurance ou une protection face à ça, on peut à ce moment-là mettre certains fonds dans les métaux précieux. Il y a plusieurs investisseurs qui le font et aujourd’hui, on peut le faire avec bitcoin. Puis, l’avantage de bitcoin versus les métaux précieux, c’est que c’est justement insaisissable et il n’y a pas de lieu physique à compromettre vraiment pour aller chercher les bitcoins.

Aimy :

Pour les garder.

Jonathan :

Exactement.

Aimy :

Donc, ce que tu me dis, c’est qu’en raison de la nature humaine, donc de la corruption, de différents trucs qui pourraient intervenir dans les chaînes économiques…

Jonathan :

L’incertitude…

Aimy :

L’incertitude, on peut venir pallier à ça avec ce système qui est très transparent, des cryptomonnaies, qui a été conçu pour cette transparence-là?

Jonathan :

Exact.

Aimy :

Donc, de dire, pour éviter ce qu’on voit se produire dans certains pays que tu nommais, comme le Nigeria et le Venezuela, donc d’aller générer un autre système économique où tout le monde aurait droit de regard et où on pourrait jouer tous à part égale?

Jonathan :

Puis j’aimerais ajouter aussi que c’est une question de volontariat. Donc, ce système-là ne force personne. Personne n’est obligé de le rejoindre, tandis que…

Aimy :

Une monnaie nationale, je n’ai pas le choix.

Jonathan :

Voilà. En tant que participant à cette nation qu’est le Canada, je suis obligé d’utiliser la monnaie qui a cours légal, dans le fond, qui se trouve à être le dollar canadien. Il n’y a pas d’autre moyen pour moi de payer mes taxes ou de payer les biens et services que je reçois, tandis que bitcoin ne force pas l’utilisation à personne.

Aimy :

Donc, la cryptomonnaie devient une monnaie volontaire?

Jonathan :

Exactement.

Aimy :

… Devient quelque chose dans quoi je m’engage si je le souhaite, si j’y crois, si je trouve ça intéressant. Puis, selon ce que tu me dis aussi, si j’ai l’impression que ça pourrait sécuriser mes avoirs ou une partie de mes avoirs.

Jonathan :

Oui. Puis c’est borderless aussi. Il n’y a pas d’appartenance à une nation, il n’y a pas de ligne qui existe…

Aimy :

Ou au système politique…

Jonathan :

Exact.

Aimy :

Ok. Donc, si je reviens avec ton analogie des métaux précieux. Si je reviens, par exemple, au concept de l’or. Ce que tu me disais, c’est que l’or, il y en a une quantité X sur la planète et quand il n’y en aura plus, il n’y en aura plus. Jonathan :

Tout à fait.

Aimy :

Versus les billets. Les billets de banque, je pourrais en imprimer pour toujours. Lorsqu’il y a inflation, on a vu, je crois que c’était la Deuxième Guerre mondiale où les marks étaient brûlés dans la rue là?

Jonathan :

Bien c’est ce qu’on voit aujourd’hui au Venezuela, justement.

Aimy :

Exact. Quand la monnaie papier perd complètement sa valeur, elle ne veut plus rien dire. Alors, ce que tu me dis, c’est que si on prend l’or, un jour on pourrait dire : voilà, on a trouvé tout l’or, il n’y a plus d’or. Ça, c’est l’or, c’est la base qui existe. Le bitcoin, ça serait un peu la même idée. Donc, de dire qu’on en mine une quantité X et il n’y a pas plus que ce X. On ne peut pas moduler la quantité et ensuite moduler la valeur.

Jonathan :

Exact. Il y a le même phénomène de rareté avec bitcoin qu’il y a avec l’or. Mais la grosse distinction qu’il y a entre les deux, c’est naturellement qu’il y en a un qui est physique et l’autre qui est digital. Il y en a qui vont avoir l’impression de moins avoir accès à leurs bitcoins par le fait-même que c’est digital, alors que moi, pourtant, j’ai la perspective contraire. J’ai la perspective que, justement, quand on a, puis là je ne parle pas de moi personnellement, je n’ai pas assez d’argent pour avoir des grosses quantités d’or. Mais supposons que je suis un gros investisseur sophistiqué et que j’ai vraiment des grosses quantités d’or, elles n’ont pas eu le choix d’être placées dans une voûte. Dans le fond, dans une voûte dans laquelle je ne verrai jamais cet or-là. Tout ce que je vais voir, c’est un morceau de papier qui me dit que j’ai ces lingots d’or-là, mais je ne les aurai réellement jamais vus. Alors que les bitcoins, je les manipule vraiment. C’est moi qui les manipule. Je n’ai pas de tiers, donc ça vient faire ce qu’on appelle la désintermédiation.

Aimy :

Donc, un contact direct avec tes avoirs.

Jonathan :

Exactement. Puis, il y a la possibilité d’avoir un tiers. Sauf que pour les gens qui veulent agir sans, ils le peuvent maintenant.

Aimy :

Ok. Un peu comme, encore une fois, vulgarisation, si moi j’avais des actions à la bourse. Je pourrais avoir un courtier qui décide de me conseiller et me dire : on met ça ici, on met ça là-bas. On place dans ceci, on place dans cela.

Jonathan :

Exactement.

Aimy :

Comme je pourrais dire : moi je m’y connais, je suis intéressée, je prends mon argent et moi-même je décide où je vais investir.

Jonathan :

100%. Mais, il faut garder en tête que, dans tous les cas, quand tu vas investir sur le marché, il va y avoir un tiers quand même. Même si on passe par une institution, comme une plate-forme comme Disnat, par exemple, chez Desjardins, bien c’est quand même la plate-forme à Desjardins et le droit de regard ultime appartient tout de même à Desjardins.

Aimy :

Alors, lorsqu’on revient encore aux cryptomonnaies, il y a la possibilité de, moi-même, prendre du point A et amener tout ça au point B, sans intermédiaire.

Jonathan :

Exact. Sans que personne ne puisse refuser. Il n’y a pas de censure qui puisse arriver.

Aimy :

Sans que personne puisse refuser, prendre un morceau…

Jonathan :

Exact.

Aimy :

Parfait, super intéressant. Alors, je reviens un peu à ton parcours à toi. Donc, tu m’as dit, à la base : je suis un mineur de bitcoin. On a parlé du concept de miner des bitcoin comme on irait chercher de l’or. Qu’est-ce que ça veut dire, concrètement, si tu parlais à un enfant de 10 ans? C’est quoi, miner un bitcoin?

Jonathan :

Miner un bitcoin, ultimement, c’est de mettre, d’appliquer, le proof of work. Le proof of work, la preuve de travail, c’est vraiment ce que ça dit. C’est une preuve d’un travail accompli, puis en donnant cette preuve de travail-là à tout le reste du réseau, le réseau reconnaît qu’il y a eu un sacrifice d’établi, qui se trouve à être la consommation, dans le fond, énergétique du réseau. En échange de ça, on obtient la permission de publier le nouveau bloc qui a la bonne solution, ultimement. Cette bonne solution-là, ça se trouve à être la preuve de travail et ultimement, ça se trouve à être juste un gros chiffre qui commence par un certain nombre de zéros. Donc, ça, c’est la preuve de travail.

Aimy :

Donc, si je reviens encore plus simple, pour mon petit cerveau à moi, ce qu’on fait, c’est de la programmation?

Jonathan :

En quelque sorte. La programmation, elle a déjà eu lieu, si on veut. Ce qui a lieu en ce moment, c’est vraiment algorithmique. C’est de la cryptographie, plutôt. On cherche un certain résultat et la seule manière de trouver ce résultat-là, c’est vraiment de les essayer les uns après les autres.

Aimy :

C’est comme un mot de passe?

Jonathan

: C’est comme un mot de passe, exactement. Puis, un petit peu comme avec les mots de passe, tu as peut-être déjà entendu parler d’une technique qui s’appelle le brute forcing? Qui se trouve à être…

Aimy :

J’essaie 001, 002, 003

Jonathan :

C’est ça.

Aimy :

Donc, déminer…

Jonathan :

C’est ce qu’on fait.

Aimy :

Ok. C’est d’aller, possibilité après possibilité, pour dire : voilà, j’ai trouvé la bonne.

Jonathan : C’est ça. On essaie jusqu’à temps qu’on trouve la bonne.Aimy :

Une fois que tu as trouvé la bonne, là, tu viens miner un morceau de bitcoin?

Jonathan :

Puis, justement, pour remontrer la pertinence de la démocratisation du réseau, à ce moment-là, une fois que la réponse est trouvée, elle est diffusée à tout le reste du réseau, puis tout le reste du réseau va vérifier cette réponse-là. Si elle est bonne, à ce moment-là, il va y avoir la récompense en bitcoin d’associée à chacun des blocs qui va être remise au mineur.

Aimy :

Donc, si j’ai dit 001, 002, 3, 4, 5, 6, 7, 007. 007, ça c’est la réponse. Donc, si ça c’est la réponse, ça l’envoie à toutes les autres personnes qui jouent dans le monde du bitcoin. Eux, ils confirment que c’est vraiment 007. Donc, ça me permet de dire : voilà, je viens d’acquérir.

Jonathan :

Exact, j’ai droit à ma récompense qui est entendue. En fait, il y a deux récompenses. Il y a l’inflation elle-même du système qui est programmée. Présentement, on est rendu à environ…

Aimy :

L’inflation étant, il y en a un de plus maintenant, alors voici ce que ça peut avoir comme impact sur les autres?

Jonathan :

Exactement. Donc là, on est à environ 17 millions de bitcoins avec un total éventuel de 21 millions.

Aimy :

Ok. À 21 millions, il n’y aura plus de bitcoin?

Jonathan :

C’est fini, il n’y en aura pas d’autres.

Aimy :

Ça va être la quantité maximale d’or?

Jonathan :

Exact.

Aimy :

Ça va être la quantité maximale, 21 millions de bitcoins.

Jonathan :

On ne peut pas dépasser ça. Donc, là, la majorité est déjà sortie, à 17 millions. Puis on prévoit que le minage va se faire jusqu’à environ 2140. Tout ça, c’est programmé, puis c’est cryptographique et on est capable de dire que l’inflation présente est de X%, puis que dans X nombre de temps, elle va être rendue de Y%. On est capable de faire ça en regardant la fréquence à laquelle un bloc est découvert. Puis c’est tout self reglemented, comment dire?

Aimy :

C’est auto-régi.

Jonathan :

C’est auto-régi. Donc, l’idée c’est que le système essaie de toujours se balancer pour trouver un bloc à chaque 10 minutes. Donc, il existe le concept qu’on appelle la difficulté de minage et cette difficulté-là, plus qu’il y a des mineurs comme moi qui s’ajoutent sur le réseau, plus qu’elle augmente.

Aimy :

Parce que tu dois le trouver avant les autres.

Jonathan :

Exact. Comme le but c’est de trouver un bloc à chaque 10 minutes, le réseau va automatiquement augmenter sa difficulté de manière à ce que la découverte des blocs soit faite à la même fréquence pour que l’inflation reste la même.

Aimy :

Fait que, jour et nuit, à travers le monde, il y a des mineurs comme toi, par exemple, qui minent et qui tentent de trouver le 1 par 10 minutes.

Jonathan :

Oui, exactement. Puis, ce qu’il y a aussi, parmi tous ces mécanismes-là, il y a le mécanisme qu’on appelle le halving et ce halving-là, dans le fond, c’est qu’à chaque environ 4 ans, c’est qu’il y a un nombre fixe de blocs qui est de 210 000 blocs, à chaque 210 000 blocs, il y a le halving qui prend place et ce halving-là, ça se trouve à être de diminuer l’inflation de moitié. Donc, on a commencé avec une découverte de 50 bitcoins par bloc pour finalement, pour ensuite tomber à 25 bitcoins, puis maintenant on est à 12.5 bitcoins par bloc découvert. En plus de ça, je parlais d’une deuxième récompense en bitcoin. Il y a également les frais de transaction, qui sont mis volontairement par les gens qui vont faire une transaction sur le réseau bitcoin. Supposons que vous et moi on fait une transaction aujourd’hui ensemble. Pour que ma transaction soit priorisée parmi toutes les transactions qui entrent, qui veulent entrer dans le prochain bloc qui a une capacité, on va compétitionner en frais. Donc, je pourrais décider de mettre un, par exemple, ce qu’on appelle un satoshi, qui est la plus petite unité de mesure dans le bitcoin. Je pourrais mettre un satoshi pour inciter le mineur à prendre cette transaction-là, la mettre dans le bloc, mais aussi récupérer le frais de transaction. Supposons que vous voulez passer avant moi, parce que le bloc a une capacité…

Aimy :

Je vais mettre deux satoshi.

Jonathan :

Voilà. Vous passeriez avant moi, je serais en attente pour le prochain bloc.

Aimy :

C’est comme une idée, je veux clarifier le concept de transaction. Si, mettons, moi je voulais payer quelque chose avec ma Visa. Puis, en même temps, sur le même réseau, il y a 75 000 autres personnes qui veulent passer leur Visa, est-ce que ça se peut que le système jamme?

Jonathan :

Oui.

Aimy :

Donc, c’est de dire : qu’est-ce que je fais pour passer avant les autres? Je veux passer avant les autres, sinon je vais perdre mon code. C’est ça que tu me dis? Sinon, quelqu’un d’autre va miner ce code-là avant moi?

Jonathan :

Dans le fond, dans le contexte du minage, indépendamment de qui fait des transactions, ça n’a pas beaucoup d’importance. Les mineurs, s’ils trouvent le code indépendamment des transactions qui sont dans de ce qu’on appelle le memory pool, ce n’est pas très important. Les transactions qui sont mises dans le memory pool, c’est vraiment dans le but d’aller chercher plus de gains financiers parce qu’on veut intégrer les transactions avec plus de frais. Maintenant, pour la transaction que toi tu fais, quand tu fais une transaction avec Visa, réellement, ça prend jusqu’à 90 jours avant qu’elle soit confirmée, avant qu’elle ne puisse pas être retournée, avant qu’il n’y ait pas de charge back ou quelque chose comme ça. Dans le cas de bitcoin, c’est un peu… Les 10 minutes dont on parle, c’est vraiment pour que ce soit indélébile, pour que ce soit écrit au permanent dans l’historique de bitcoin. Mais, réellement, tu pourrais faire un peu comme avec Visa, passer ta transaction, assumer que tout va bien se passer et qu’il n’y aura pas de charge back et que dans 10 minutes, elle va être confirmée de toute manière. Donc, réellement, ta transaction, une fois que tu l’as passée, tu pourrais assumer faussement, réellement parce que tu n’en as pas de certitude, mais tu pourrais assumer que tout devrait bien se passer et qu’elle va passer. Par exemple, pour terminer avec ça, il y aurait, par exemple, tu achètes un café à 2$, il n’y a pas une grosse incidence à laisser une transaction non confirmée…

Aimy :

Mais?

Jonathan :

Ouin…

Aimy :

Je te coupe un instant, juste pour clarifier un truc. C’est quoi l’objectif de faire passer ma transaction avant celle des autres?

Jonathan :

En fait, c’est justement, c’est propre à toi, dans le fond et ça va surtout être une question de valeur. Donc, pour en revenir à l’exemple de café, si tu fais une transaction de café qui coûte 2$, tu n’as pas nécessairement besoin d’avoir la confirmation parce que, si par exemple, il y aurait une fraude de 2$, ce n’est pas la fin du monde. Mais, par exemple, si tu es en train d’acheter une voiture de luxe, allons-y avec une voiture de 100 000$, puis que tu fais la transaction avec le commis, tu vas vouloir que dans les 10 minutes, du moins le commis va vouloir que dans les 10 minutes, la transaction soit confirmée avant de remettre les clés. Dans ce cas-ci, on va vouloir passer avant les autres et peut-être qu’on va vouloir prioriser en mettant un frais de 5, 10, 15 dollars de plus que les autres parce qu’on veut absolument passer dans le prochain bloc. Pour une transaction d’une centaine de milliers de dollars, je pense que ça fait du sens.

Aimy :

Est-ce qu’il y a un bloc créé à toutes les 10 minutes?

Jonathan :

C’est environ à chaque 10 minutes. Évidemment, dépendamment de quand est-ce que la solution est trouvée.

Aimy :

Ces 10 minutes-là, c’est un peu le rate du bloc?

Jonathan :

C’est ça. C’est comme son heartbeat si on veut. Ce n’est pas fataliste, ce n’est pas chaque 10 minutes tapant. C’est vraiment plus une question que les blocs vont probabilistiquement se trouver à chaque 10 minutes.

Aimy :

C’est une statistique.

Jonathan :

C’est ça. Des fois, ça pourrait être aux 20 minutes. D’autres fois, il pourrait y en avoir deux de suite, une minute après l’autre.

Aimy :

C’est une fois qu’ils sont complétés que le bloc clôt et qu’un autre s’ouvre.

Jonathan :

Là, la course commence pour le prochain bloc.

Aimy :

Wow! Là, je reviens à la base. Là, tu nous as expliqué un peu c’est quoi miner un bitcoin. J’aimerais savoir, concrètement, parce que je sais que tu es aussi président de D-Central et nous allons y revenir dans un instant. Mais concrètement, si tu étais purement mineur, que tu ne faisais rien d’autre, tu te lèves le matin, tu arrives au bureau, tu enlèves tes bottines, qu’est-ce tu fais en tant que mineur?

Jonathan :

Dans le fond, ça va vraiment dépendre du scale des opérations de minage. Dans mon cas à moi, je ne vais pas nécessairement avoir à me rendre dans un endroit physique, enlever mes bottes, etc. Des fois, ça va tout simplement être de me connecter, plutôt, à toute mon infrastructure, voir que tout est toujours en santé. Le rôle d’un mineur, avant tout, une fois que tout est en place, c’est vraiment de monitorer et de faire sûr que l’infrastructure est en santé.

Aimy :

Fait que c’est comme un travail de régisseur, d’inspecteur un peu?

Jonathan :

Si on veut.

Aimy :

De vérifier que tout roule comme c’est supposé.

Jonathan :

Exactement. Puis, dans un cas où est-ce que là, il y a une intervention qui est nécessaire, idéalement on priorise l’intervention qui se fait virtuelle. Donc, qui se fait à distance. Puis, dans une mesure où est-ce que là, vraiment, il semble y avoir un bris quelconque ou quoi que ce soit, là il y a un déplacement physique aussi qui va se faire jusqu’au lieu. Nous, dans notre cas, c’est à Joliette qu’on a plusieurs entrepôts là-bas. On va se déplacer jusque là-bas, apporter la modification nécessaire pour optimiser naturellement ce qu’on appelle le à charge, donc le taux de calcul qu’on fait.

Aimy :

Ok. Fait que tu me dis, je vérifie l’infrastructure à distance. C’est quoi, concrètement, cette infrastructure-là?

Jonathan :

Donc, cette infrastructure-là, c’est plusieurs choses. C’est toute une infrastructure électrique, toute une infrastructure de ventilation et toute une infrastructure IT. Les trois travaillent ensemble. Donc, l’électricité est fournie aux machines. Dans le fond, cette électricité-là est consommée pour faire ces gros calculs dont on parle. Suite à ça, ces calculs-là sont envoyés naturellement par internet. Puis ça génère une énorme chaleur, en fait, tout ça. Évidemment, il faut évacuer la chaleur qu’on a en trop et faire entrer aussi de l’air froid. Soit par la climatisation, ou ici au Québec, on a la chance ou la malchance d’avoir l’hiver.

Aimy :

Donc, tu as un paquet de machines dans un entrepôt, qui font 001, 002, 003, qui calculent jour et nuit. Puis toi, tu dois t’assurer que chaque machine continue de rouler correctement?

Jonathan :

Oui. J’ai un énorme coût électrique qui se chiffre dans les milliers de dollars et cette consommation électrique-là, il faut que je la rentabilise en faisant sûr que chacune des machines vont calculer au maximum de leurs capacités. Mais surtout, sans nécessairement regarder la machine qui va faire le plus de résultats, on veut la machine qui va faire le plus de résultats pour le moins de consommation énergétique possible. Le but, c’est d’avoir le moins de coût pour le plus de revenus, naturellement.

Aimy :

Tes machines, dans le fond, c’est un ordinateur qui fait une seule chose?

Jonathan :

Oui, exactement.

Aimy :

Tu as comme un ordinateur qui fait un calcul, jour et nuit, qui demande de l’électricité pour le faire, avec un système de ventilation tout autour pour les refroidir pour ne pas que tes systèmes fondent, dans le fond?

Jonathan :

Exactement, parce que dans cette machine-là il peut facilement faire entre 80 et 100 degrés.

Aimy :

Donc, toi tu dois veiller à ce que ton bill d’Hydro, à la fin du mois, il en ait valu le coût?

Jonathan :

Oui.

Aimy :

Donc, ça, c’est ce qu’un mineur fait?

Jonathan :

Oui.

Aimy :

Sur-vulgarisé, bien sûr.

Jonathan :

Bien sûr.

Aimy :

Parfait. Maintenant, en tant que président de D-Central, c’est quoi D-Central?

Jonathan :

Bien, D-Central, dans le fond, c’est une entreprise qui a vu le jour en 2016. Le but, puis c’est ce que le nom témoigne, le but c’était de décentraliser le protocole de bitcoin.

Aimy :

Parce qu’au départ, tu me disais, le protocole de bitcoin, il devait être situé où?

Jonathan :

En fait, le protocole de bitcoin, le but c’est vraiment qu’il soit décentralisé puis dans son inception, ça se faisait très bien avec le fait que c’était les ordinateurs qui minaient les bitcoins. Suite à ça, il y a eu les GPU, donc les cartes graphiques qui ont été optimisées de manière à pouvoir faire ces calculs-là. Finalement, il y a eu l’avènement de ce qu’on appelle des FGPE et des puces Asic. Ces puces Asic-là, elles sont faites dans des fonderies et ces fonderies-là, elles sont pour la plupart sur le continent d’Asie. Donc, naturellement, l’Asie a eu un gros… comment dire?

Aimy :

Ils avaient le gros bout du bâton…

Jonathan :

Ils avaient un avantage sur nous.

Aimy :

En disant, si moi j’arrête de faire des puces, bien vous, ça te ralentit.

Jonathan :

C’est surtout une question d’import, une question de coût initial. Pour les Asiatiques, ça a été beaucoup plus abordable de commencer ces activités-là. En plus de ça, l’électricité est super abordable dans beaucoup de villes en Chine. Pour prendre l’exemple de la Chine, il y a plusieurs villes fantômes dans lesquelles des centrales ont été construites, autant hydroélectriques que nucléaires. C’est une énergie qui est relativement propre, mais aussi très abordable. Cette énergie très abordable, dans le fond, combinée au fait que les puces sont produites sur le continent a vraiment donné un gros avantage compétitif à la Chine, par exemple, en ce qui a trait au minage. Il y a un certain danger à une concentration en ce qui a trait de tout le minage au même endroit. Ce danger-là, dans le fond, ça se trouve à être, prenons par exemple que le gouvernement de Chine ne voudrait pas que bitcoin existe, tous les serveurs sont sur ces lieux-là, c’est beaucoup plus facile après ça de venir fermer les portes de ces entreprises-là. Tandis que maintenant, avec la distribution et la décentralisation du minage, même si le gouvernement du Québec décide de venir fermer mon entreprise à moi, il y a encore plein de mineurs qui continuent de miner partout dans le monde et le bitcoin existe encore.

Aimy :

Dans cette idée de démocratisation de l’économie, au départ, il y avait bitcoin, et toi tu es venu lancer ta compagnie dans ce mouvement-là. En voulant dire, ça ne sera pas à un seul lieu géographique, ça va être ici aussi, au Québec, à Joliette.

Jonathan :

C’est ça.

Aimy :

Et on va participer à cet événement-là.

Jonathan :

Oui. Le but, c’est vraiment de dire que bitcoin appartient vraiment à tout le monde et à personne.

Aimy :

Donc, si j’arrive avec… Le fait que tu n’as pas de lieu physique nécessairement, où est-ce que tu travailles, tu as à te connecter. C’est ça le début d’une journée de travail, par exemple.

Jonathan :

Généralement, oui.

Aimy :

Généralement. Qu’est-ce que tu nommerais comme étant tes responsabilités? Pas en tant que mineur, mais aussi en tant que président de D-Central?

Jonathan :

Bien, c’est sûr que les responsabilités du président d’une entreprise, c’est de maximiser les revenus de son entreprise. Donc, l’idée c’est aussi de diversifier les activités. Maintenant, on a parlé du minage et D-Central a mis tout ça en place. On est aussi en train de mettre en place toutes sortes de services, par exemple, le cloud, le management IT, puis tout ça. Pour ce qui a trait à bitcoin, puisque c’est le sujet du jour, bitcoin en tant que tel, il faut aussi, c’est une technologie qui évolue énormément alors il faut rester à l’affût de tout ce qui se passe. Je pense qu’une grosse partie de mon rôle est de continuer de participer dans la communauté, continuer à échanger, continuer à m’éduquer, continuer à aller à des conférences, à faire de la consultation, à me faire faire de la consultation. Donc, il y a tout ce rôle de prendre la connaissance et de la retransmettre parce qu’il y a tout un apprentissage pour ce pourquoi qu’on se rencontre aujourd’hui. Il y a plusieurs gens qui veulent savoir qu’est-ce que c’est bitcoin et qu’est-ce que ça fait dans la vie. Je pense qu’en ce moment, une grosse majorité de mon rôle se trouve à être plutôt sur tout le côté académique de bitcoin, plutôt que le côté pratique.

Aimy :

Faire connaître un peu la chose?

Jonathan :

Faire connaître, mais aussi connaître.

Aimy :

Aussi connaître. Fait que c’est autant, toi continuer de rester informé, que d’essayer d’informer les gens et de faire grandir le mouvement?

Jonathan :

Oui, exactement.

Aimy :

Ça m’amène un peu à une question très classique, académique. C’est quoi ta formation à toi, à la base?

Jonathan :

Donc, moi, j’ai l’éducation secondaire qui est complétée. Ensuite, j’ai entamé le cégep. J’ai entamé une AEC en finance et entamé aussi une AEC en informatique, sans terminer aucune de mes éducations post-secondaires, dans le fond. Je me vois vraiment comme une personne self made parce que j’ai vraiment une grosse… une grosse, comment on appelle ça déjà?

Aimy :

Tu es un autodidacte?

Jonathan :

Je suis un autodidacte. Puis si on regarde aussi, par exemple, mon code MBTI, je sais que c’est souvent employé dans ton domaine, donc mon MBTI à moi c’est INTJ. Donc, on a tendance à être assez résistants à l’éducation et résistants à ce qui est institutionnel.

Aimy :

Tu dis, on a tendance, là tu parles de ton code MBTI?

Jonathan :

Oui, voilà.

Aimy :

Pour clarifier pour les gens qui sont peut-être un peu moins familiers avec l’outil, tu as un profil quand même type des gens dans ton domaine. Des gens qui sont un peu self made, comme tu disais. Des gens qui ont cette ténacité-là de dire que ce n’est pas parce que je n’ai pas un cours lundi matin à 10h que je ne vais pas apprendre quelque chose aujourd’hui. Donc, par toi-même, de t’asseoir, de t’éduquer?

Jonathan :

C’est ça.

Aimy :

C’est quelque chose qui te ressemble?

Jonathan :

Oui, puis ce n’est pas parce que je n’ai pas d’éducation post-secondaire que je n’ai pas de certifications qui sont pertinentes autant au milieu IT traditionnel qu’à mon milieu à moi, bitcoin. J’ai une certification bitcoin, une des seules qui existe présentement. Donc, la volonté d’apprendre, elle est définitivement là. C’est plutôt la volonté de se conformer qui n’est pas là.

Aimy :

C’est sûr que, dans le système éducatif classique, comme il est fait maintenant, bon le secondaire, le cégep, l’université, le type de formation nécessaire pour faire ce que toi tu fais aujourd’hui, il existe un peu à moitié. Il bat un peu de l’aile, dans le sens où il a été devancé. Le système scolaire a été devancé par ce qui a été créé au niveau de la technologie. Comment est-ce que toi tu fais pour savoir qu’une formation ou une certification n’est pas bidon?

Jonathan :

C’est une très bonne question. C’est sûr qu’il y a une sorte d’appel à l’autorité, dans ce cas-là. Donc, ça va être de voir les personnes qui performent dans ce milieu-là, un peu à quoi ces personnes-là ont fait confiance et se sont fiées. Mais il y a aussi l’expérience du milieu IT plus traditionnel qui permet quand même de faire certains liens et de pouvoir voir que XYZ c’est vrai et que ABC c’est faux. Donc, il n’y a pas de bonne réponse à te remettre en ce moment parce qu’en ce moment…

Aimy :

C’est en construction aussi…

Jonathan :

Exactement. C’est tellement novateur, puis comme je le disais, il y a tellement de misconception dans tout cet espace-là. Comme je disais, le blockchain en général est amené souvent aux masses comme quelque chose qui va régler tous les problèmes dans le monde. Tu vois, moi j’opère dans ce milieu-là et ce n’est pas du tout ce que je pense. Je pense que ça va régler certaines questions vraiment clés, comme par exemple, les questions monétaires. Mais, je ne suis pas certain que c’est nécessairement quelque chose de magique qui va régler tous les problèmes, comme certaines personnes vont le prétendre ou comme certaines équipes de marketing vont le faire paraître.

Aimy :

Ils vont essayer de le vendre un peu. Donc, quand tu me dis : moi j’ai la diligence de m’asseoir et d’apprendre par moi-même, tu as aussi la diligence de te questionner, d’avoir ton esprit critique et de dire, bon bien cette formation qui m’est proposée, est-ce qu’elle vaut le coût ou pas?

Jonathan :

100%

Aimy :

Donc, d’aller faire de la recherche en arrière pour voir, j’utilise peut-être le terme influenceurs mal, mais des influenceurs, des pionniers ou des gens qui se sont construits dans le domaine, est-ce qu’eux auraient tendance à la recommander ou pas?

Jonathan :

Voilà.

Aimy :

Puis, de l’information que j’ai déjà en tête, ça, est-ce que c’est valide ou pas ce qu’ils sont en train de m’offrir?

Jonathan :

Exact. Puis, aussi, c’est une question de, après tout, qu’est-ce que je veux apprendre? Est-ce que ça parle de cryptographie? Est-ce que ça parle de minage? Est-ce que ça parle de ce que moi je veux apprendre? Peut-être qu’une certification peut être meilleure qu’une autre, mais si on apprend quelque chose qu’on veut apprendre, je pense que c’est toujours utile.

Aimy :

Comme dans n’importe quoi.

Jonathan :

Oui.

Aimy :

Concrètement, tu m’as dit : j’ai une certification bitcoin, l’une des rares qui existe au monde. Est-ce que tu as fait d’autres types de certifications?

Jonathan :

Oui. J’en fais aussi en informatique traditionnelle. J’occupe aussi un emploi, présentement, étant donné le moratoire qu’il y a avec Hydro Québec. Je me garde très occupé et justement, cet employeur-là constate la même chose que moi. Dans ce milieu-là, c’est difficile de trouver quelqu’un avec l’éducation post-secondaire qui va fitter le profil nécessaire, alors on priorise quand même beaucoup à mon emploi présent d’avoir des certifications. D’avoir des certifications nécessairement qui sont pertinentes à ce qu’on fait. Si on installe beaucoup de firewalls ou si on installe beaucoup de back-ups ou des choses comme ça, on va aller chercher des certifications qui sont pertinentes à ces domaines-là.

Aimy :

Je pourrais aller me chercher une certification de Microsoft, je pourrais aller me chercher une certification de Google, dépendamment de ce que je fais, de ce qui est pertinent pour mon besoin à moi.

Jonathan :

Voilà.

Aimy :

Là, tu me dis qu’en même temps, en parallèle, dû au moratoire, j’ai un emploi pour quelqu’un d’autre en runnant D-Central en même temps. Si on amenait juste un mot rapide sur le moratoire, pour clarifier ce que c’est? Pourrais-tu m’expliquer un peu les circonstances actuelles?

Jonathan :

Certainement. Donc, en 2017, il y a eu une bonne enflammée des cours de bitcoin. Cette enflammée-là et l’attention qui était portée sur le secteur a mis en évidence qu’au Québec, on a une énergie quand même assez abordable, une énergie qui est propre. C’est quelque chose qui est recherché par les mineurs parce qu’évidemment on va consommer beaucoup d’énergie et on veut qu’elle soit propre. On ne veut pas être critiqués, que ce soit parce que la personne elle-même est environnementaliste, est conscientisée ou que ce soit par perception publique, on ne veut pas utiliser une mauvaise énergie. En plus de ça, on veut une énergie qui est abordable. Le Québec a un autre avantage, on a les hivers. Donc, tout ça ensemble, en incluant aussi notre stabilité politique.

Aimy :

Juste pour clarifier encore au niveau de l’hiver, c’est le fait que vous avez besoin de ventilation pour refroidir vos machines. Donc, comme il fait froid, je n’ai pas besoin de mettre de la clim, je n’ai qu’à ouvrir la fenêtre?

Jonathan : Donc, c’est moins d’argent à dépenser sur la climatisation. Moins de coûts et moins d’infrastructures, également. Donc, tout ça, ça va tout ensemble. Puis, tout ça ensemble, ça fait que le Québec est devenu un endroit très chaud pour le minage. Les Asiatiques eux-mêmes se sont mis à vouloir, justement, placer des opérations ici et avec tout ça, il y a eu vraiment une grosse demande, dans le fond, Hydro Québec ne sachant pas trop quoi faire avec le secteur. Je tiens à préciser qu’Hydro Québec était quand même en opération de séduction. Ils voulaient attirer les data centers puis les mineurs et finalement, quand la demande s’est pointée, ils ont mis les pieds sur les breaks.Aimy :

Il y a comme eu une grosse vague, plein, plein, plein de demandes en même temps…

Jonathan :

Puis là, ils ont mis en place, dans le fond, un moratoire. Ça s’est mis en place avec le gouvernement précédent, du PLQ, avec le ministre de l’Énergie, Pierre Moreau. Mais, depuis, le moratoire a toujours lieu. Il y a des débats en ce moment à la Régie de l’énergie auxquels on a participé. On a fait plusieurs interventions, on a envoyé des documents. Tout ça, c’est public pour les gens qui veulent consulter nos opinions et nos commentaires sur la situation. Là, on est toujours en moratoire aujourd’hui et ce moratoire-là, il se résulte en l’impossibilité pour nous de modifier nos opérations. En ce moment, on est pris. C’est un moratoire, donc on ne peut plus rien faire en ce moment.

Aimy :

Quand tu dis on est pris, c’est qu’ils vous retiennent au stade où vous étiez au moment où le moratoire est tombé?

Jonathan :

A été mis en place.

Aimy :

C’est ça, a été mis en place. Donc, si toi, demain matin tu disais, je vais m’acheter 10 nouvelles machines, je veux runner encore plus, tu n’aurais pas l’énergie pour, on ne te la donnerait pas?

Jonathan :

Non, on me pénaliserait en fait, si je les branchais.

Aimy :

Tu aurais une taxe de plus à payer?

Jonathan :

En fait, ça serait une augmentation de mon tarif électrique sur toutes mes opérations, de 300%.

Aimy :

Ok. Donc, ils te disent, tu roulais ta compagnie avec X besoin électrique, tu te maintiens à ça pour l’instant, sinon on augmente ton tarif?

Jonathan :

Exactement.

Aimy :

Donc, ils sont en pourparlers, mais il n’y a rien de certain encore pour l’instant.

Jonathan :

Malheureusement non.

Aimy :

C’est le statu quo aujourd’hui.

Jonathan :

Exact.

Aimy :

OK. En espérant qu’il y ait de l’évolution là-dedans, puis de voir comment ça va se dérouler. Quand tu penses, tu as un parcours un peu particulier, mais qui t’a amené vers quelque chose que tu as vraiment choisi. Tu as dit que ce n’était pas l’école classique, je vais aller me chercher une certification, je vais aller me chercher des connaissances, je vais m’éduquer, je vais lire, je vais comprendre. Tu t’es rendu jusque-là, tu me dis, le moratoire d’Hydro Québec, ça me donne un peu l’impression que tu es encore, j’utilise le terme comme on se l’est dit tout à l’heure, j’utilise le terme d’une manière très pure là, tu es un peu marginal au niveau du marché? Tu ne ressembles pas à beaucoup d’autres travailleurs.

Jonathan :

Exact.

Aimy :

Lorsque vient le temps pour toi d’embarquer dans le système, mettons que tu veux faire une demande de prêt à la banque, mettons que tu veux t’acheter une maison, que tu veux demander une hypothèque, comment est-ce que tu présentes ton cas et quelle réponse est-ce que tu reçois?

Jonathan :

Dans l’immédiat, on présente le cas comme une compagnie technologique parce que c’est vraiment mécompris. Mais on le dit, dans le fond, que c’est une compagnie bitcoin. Quand ça nous est demandé, parce que ça nous est pratiquement toujours demandé, on explique un petit peu en quoi ça consiste. Mais quand ça arrive à l’étape de l’analyse, la réalité présentement, malheureusement, c’est que ces activités-là sont mécomprises et ne sont pas reconnues. Donc, dans l’immédiat, tous les actifs qu’on détient qui sont liés à la compagnie D-Central ne sont pas reconnus comme un actif par aucune institution avec laquelle on fait affaire. Donc, ce que ça a comme incidence, naturellement, c’est que c’est beaucoup plus difficile pour nous d’obtenir du crédit, c’est beaucoup plus difficile pour nous de faire reconnaître la valeur qu’on a. Mais ce n’est pas quelque chose qui nous arrête pour autant, car nous on reconnaît la valeur que ça aura éventuellement. Puis on reconnaît qu’éventuellement ces acteurs-là vont aussi reconnaître tout l’investissement qu’on a mis là-dedans.

Aimy :

Pour toi, c’est une question de temps?

Jonathan :

Oui. C’est une question de temps, mais en ce moment, on se sent un petit peu us against the world.

Aimy :

Donc, on est sur pause et vous êtes un petit peu, pas hors la loi, mais tout seuls dans votre gang.

Jonathan :

Oui.

Aimy :

Tu dois avoir une tolérance au risque, une tolérance à l’incertitude qui est quand même prononcée?

Jonathan :

Je l’ai appris avec cette aventure-là, honnêtement. Je ne pensais pas avoir une tolérance comme ça et en toute franchise, je dois dire aux gens qu’il y a des moments où est-ce qu’on s’est… Où moi, personnellement, il y a des moments où est-ce que je me suis mis dans un coin vraiment en petit bonhomme à shaker parce qu’il y avait des événements qui se passaient. Par exemple, des fonds qui avaient été saisis parce qu’ils voulaient faire des investigations et ça nous empêche d’arriver au prochain mois, des choses comme ça. Donc, on a vécu toutes sortes d’événements et il y a des fois où je pensais que tout s’effondrerait. J’ai déjà fait des recherches sur les faillites personnelles autant qu’entreprise. Je suis passé par tous les états. Malgré tout, on est encore là aujourd’hui et on veut encore.

Aimy :

C’est vraiment un projet auquel tu crois.

Jonathan :

Oui.

Aimy :

Tu te dis : oui, je mets mon énergie, je mets mon temps, je mets mon argent, j’investis là-dedans parce que je le sais que ça va débloquer?

Jonathan :

Et c’est aussi le legs que je veux laisser. C’est ce que je veux voir dans le monde et même s’il existe certains courants qui ne veulent pas nécessairement voir ça, ce serait un échec pour moi de ne pas se battre pour la vision que j’ai du monde.

Aimy :

Ça fait partie de la mission que tu te donnes, en tant qu’humain, au-delà de juste tes poches.

Jonathan :

Oui.

Aimy :

Qu’est-ce qui t’a amené dans ce parcours-là, tu dirais?

Jonathan :

Je pense que ma quête de la liberté individuelle est quand même un gros élément motivateur. L’élément déclencheur serait probablement en 2013 quand j’écoutais un économiste, un économiste pour lequel j’ai beaucoup de respect et lui se trouvait à être très sceptique sur bitcoin. Moi aussi, je l’étais, je partageais son scepticisme à ce moment-là. Je pensais que bitcoin, c’était un scheme. C’est un peu comme ça que l’économiste l’illustrait et à ce moment-là, il y avait eu la bulle de bitcoin qui était passé de 300$ à 1300$. Ça avait quand même, ça m’avait… J’ai commencé à me poser des questions à ce moment-là. J’ai commencé à me demander pourquoi c’était arrivé, pourquoi les gens qui achetaient bitcoin à ce moment-là le faisaient. Puis, éventuellement, ce même économiste-là, que j’écoutais, Peter Schiff, il a reçu un bitcoiner, dans le fond, une personne technique qui comprenait ce qui se passait avec bitcoin. Ils ont eu un débat et c’est l’une des premières fois où est-ce que j’ai pris le côté opposant à mon économiste. Je me suis mis à aller faire plus de recherches du côté technique parce qu’il y a des choses, il y a eu des déclics, il y a vraiment des choses que j’ai voulu aller chercher sur le fonctionnement de bitcoin et là je comprenais.

Aimy :

Terrain, là.

Jonathan :

C’est ça. À partir de ce moment-là, jour après jour, soirée après soirée, nuit après nuit, ça s’est mis à être une heure de mise en recherche et oups! un deux heures, puis trois et éventuellement ça a été des journées complètes à fouiller et à comprendre ce qui se passait. Finalement, en 2016, on a décidé vraiment de mettre le hands on et de participer à ça. De ne plus juste être des personnes qui suivent ce qui se passe. Finalement, se mettre les deux mains dedans.

Aimy :

OK, fait que tu t’es dit, c’est bon. Ça m’appelle, ça m’intéresse, ça me ressemble. Je me lance.

Jonathan :

Oui.

Aimy :

Qu’est-ce que tu dirais qu’il faut pour être un bon mineur de bitcoin ou en tout cas, un bon joueur dans ton industrie?

Jonathan :

Être un bon mineur, réellement, ce n’est pas compliqué. Être un mineur, réellement, c’est un peu ce que je disais tout à l’heure. C’est d’avoir la ventilation, c’est d’avoir l’électricité et d’avoir les machines. Ça, en soit, c’est rien de compliqué.

Aimy :

Être un bon président d’entreprise technologique?

Jonathan :

Dans le fond, une bonne entreprise, que ce soit moi en tant que président ou une bonne entreprise de bitcoin dans l’espace, je pense que c’est vraiment un gros spectre. Il n’y a pas de réponse universelle à ça. Il y a des mineurs qui, eux, vont juste brancher leurs machines. Il y en a qui ont juste vingt machines, qui vont brancher ça et c’est tout. Il y en a des grosses entreprises comme Bitfarms ici au Québec, qui eux ont des milliers de machines. Ils ont de l’expertise, ils ont des centres où est-ce qu’ils font de la réparation. Il y a moi, par exemple, qui suis un peu entre les deux et dans notre cas à nous, on exerce surtout un rôle qui est avec la communauté. On fait beaucoup d’éducation, on organise des conférences, on fait de la consultation. On fait de la consultation avec de nos compétiteurs, en passant. On va aller voir de nos plus petits compétiteurs à nos plus gros compétiteurs.

Aimy :

D’avoir cette ouverture-là…

Jonathan :

Oui. Il n’y a pas de réponse universelle à qu’est-ce qu’un bon mineur? C’est un petit peu de prendre la place qui nous convient à nous. Puis c’est un gros spectre. Moi, sur ce spectre-là, j’ai choisi de me placer pas nécessairement sur le nombre, mais sur la qualité, puis sur l’éducation, le social, la compréhension, la collaboration aussi.

Aimy :

Le rayonnement?

Jonathan :

C’est ça.

Aimy :

Comment est-ce que tu penses que ton industrie va évoluer dans les 10, 15, 20 prochaines années?

Jonathan :

C’est une industrie qui va être vraiment intéressante, que ce soit en tant que participant qu’en tant qu’observateur. C’est une industrie que ça va être très intéressant à voir évoluer. Plusieurs raisons à ça. L’une des raisons premières, on le sait, c’est que ça consomme beaucoup d’énergie. Ça va apporter toutes sortes de changements de comportements, selon moi. On va faire un peu d’imagination aujourd’hui. Je parlais tout à l’heure de la chaleur que dégagent mes machines. Mais on en a besoin de chaleur. Ultimement, c’est un deuxième produit qui est généré, dans le fond, de ces activités-là. Ici, au Québec, on utilise beaucoup l’électricité pour se chauffer. Cette chaleur-là est obtenue, dans le fond, par un peu un gaspillage parce que ce qu’on fait, on passe de l’électricité dans quelque chose qui résiste. Cette résistance-là fait une perte qui est de la chaleur. Plutôt que de mettre de la résistance, imaginons que nos calorifères aujourd’hui seraient composés de puces qui feraient justement ce calcul-là. Je disais justement que bitcoin, moi la raison pour laquelle j’ai rejoint avec D-Central, c’est la décentralisation du protocole. Imagine maintenant si tous les calorifères partout dans le monde étaient plutôt des espèces de mineurs qui étaient en train d’effectuer ces calculs-là. Maintenant, toi, à chauffer ton hiver, tu n’aurais plus nécessairement de coûts parce que tu aurais un revenu associé à ça. Puis même si le revenu n’était pas autant que ce que ça te coûte en électricité, est-ce que ce n’est pas mieux que ce qu’on a comme situation présente?

Aimy :

À concurrence de 21 millions.

Jonathan :

À concurrence de 21 millions pour ce qui est de l’inflation. N’oublie pas qu’il y a aussi les frais de transaction. Donc, il y aura toujours une perte, à miner.

Aimy :

À avoir de la mine.

Jonathan :

Oui.

Aimy :

Super intéressant. Fait que toi, tu vois des avenues un peu tentaculaires. Ça pourrait aller dans plusieurs avenues en même temps, pas juste en ligne droite.

Jonathan :

Non, non, c’est ça. On voit beaucoup l’opération de minage comme ce que c’est en ce moment…

Aimy :

Puis les by-products…

Jonathan :

Les gens voient ça comme quelque chose de statique, bon bien les mineurs on fait ça et si le protocole augmente de 100 fois, on a 100 fois plus de mines. Moi, je ne pense pas que c’est vrai. Je pense qu’on va peut-être avoir 10 fois plus de mines pour une augmentation de 100 fois puis que, réellement, il va y avoir toutes sortes de produits alternatifs qui vont sortir de ça. En plus de ça, il y a la question de l’efficience des machines, des meilleures puces puis tout ça.

Aimy :

Ce n’est pas fini du tout…

Jonathan :

Et il y a plusieurs choses que même moi, probablement, je n’arrive pas à imaginer.

Aimy :

Parce que les avancées technologiques roulent en même temps, en parallèle.

Jonathan :

Voilà.

Aimy :

Ok. Pour clore sur tout ça, quel conseil est-ce que tu donnerais à quelqu’un qui voudrait se lancer dans ton domaine?

Jonathan :

Dans le fond, d’avoir la tête froide, ça, c’est sûr et certain. Il faut accepter qu’il y a plusieurs personnes qui ne seront pas d’accord avec ce qu’on essaie de faire. Maintenant, c’est correct de ne pas être en accord. Dans ma perspective à moi, ce qui est important, c’est qu’on ait une place pour débattre des idées et tant qu’il n’y a pas d’externalités qui sont négatives à amener sur les autres, je pense qu’on devrait avoir le droit d’exercer notre activité. Comme eux, s’ils ont des activités pour lesquelles on n’est pas tout à fait d’accord, tant qu’il n’y a pas d’externalités qui sont forcées sur nous, ils devraient avoir droit à leurs activités. C’est un peu le principe du vivre et laisser vivre. Donc, le meilleur truc, je dirais, il faut garder la tête froide. C’est un milieu qui est risqué, c’est un milieu qui est extrêmement encore critiqué. Il faut être capable de débattre tout en ayant un respect avec les gens. Ce n’est pas en étant hostile aux gens qui nous sont hostiles qu’on va réussir à faire avancer le mouvement. Il faut vraiment avoir une approche éducative avec les gens.

Aimy :

Une ouverture, versus le scepticisme.

Jonathan :

Exactement.

Aimy :

Donc, tu encourages les gens à garder la tête froide, à aller plus vers l’éducation, faire connaître. Qu’est-ce que quelqu’un pourrait faire, pour commencer à plonger concrètement dans le domaine?

Jonathan : Il y a plusieurs choses. Naturellement, l’internet, aujourd’hui, c’est la meilleure encyclopédie qu’on a.Aimy :

À l’infini…

Jonathan :

Il faut faire attention parce que, comme avec toute chose qu’on a, il existe des mauvaises nouvelles. Il existe des mauvais…

Aimy :

Des mauvaises informations.

Jonathan :

Des mauvaises informations, voilà. Sinon, à Montréal, on a une communauté qui est quand même… La communauté tech à Montréal, en général, est quand même assez éveillée. Ça s’explique beaucoup par le fait qu’on a un hiver, qu’on passe beaucoup de temps à l’intérieur, au chaud, devant nos ordinateurs. Mais, il y a plusieurs meet-up. Justement, on devrait en avoir un en janvier. Il n’est pas encore confirmé, mais on devrait en avoir un en janvier, un meet-up. Chacun de ces meet-up là, c’est une possibilité de faire du networking. Si on veut participer dans l’espace, il y a des entreprises qui sont là. Il y a des entreprises qui vont peut-être engager, qui sont là. Il y a des entreprises qui participent, qui vont pouvoir éduquer un peu sur ce qu’ils font et ce n’est pas tout le monde qui le fait de la même manière que moi. Il va pouvoir y avoir des échanges sur les différents modèles de machines, etc. On parle de minage, mais si on parle plus généralement sur bitcoin, il existe tout plein de perspectives et d’applications à bitcoin. On parlait beaucoup de l’aspect monétaire qui est, dans le fond, sa raison d’être. Mais il existe d’autres d’applications qu’on peut utiliser grâce à bitcoin. Par exemple, on peut notarier un document. Toutes ces choses-là, ça ne peut pas être toute une personne ou une entreprise qui les connaît ou qui les travaille.

Aimy :

Donc, on peut aller explorer ces différentes avenues-là aussi?

Jonathan :

C’est ça, puis d’aller échanger. C’est vraiment d’aller échanger avec la communauté parce qu’il existe plein de projets. Comme je disais tout à l’heure, des choses que même moi je n’arrive pas à imaginer qui sont possibles avec bitcoin. Puis il y a peut-être quelqu’un d’autre à Montréal qui travaille dans son sous-sol sur quelque chose et dont personne n’a entendu parler encore. Tant qu’on ne va pas donner à cette personne-là la chance de rayonner à son tour, on ne saura jamais que cette chose-là existe. Donc, pour moi, c’est vraiment une question d’aller faire du networking, participer et écouter.

Aimy :

Jonathan, ça a été hyper intéressant.

Jonathan :

Merci à vous de me recevoir.

Aimy :

Merci à notre invité et merci à vous d’avoir écouté cet épisode des Portraits professionnels. Pour plus de détails sur cette profession, visitez notre site internet au www.saltoconseil.com.